16/04/2012

Avril (a)

Photo de la quinzaine:
Pont sur l'autoroute qui traverse le centre de Santiago
(Nouvelle série sur les ponts de la ville)





1-04-2012 - Ce Dimanche des Rameaux, les églises sont bondées de gens qui n'y assistent aucun autre dimanche. C'est le fruit d'une croyance populaire (superstition) selon laquelle les rameaux bénis protègent du "mauvais sort".
2-04-2012 - La consommation de bière a dépassé el 58% des boissons alcoliques (53,6%), le vin -qui était la boisson nationale par excellence- ne représente plus que 22,7%.
- La persistence des hautes températures a fait tomber de 50% les ventes de la mode automne-hiver.
4-04-2012 - Un carabinier en civil a été abattu par ses collègues de la police civile dans un incident confus. Pour mieux faire, les deux carabiniers en civil qui devaient stationner sur le parking d'une ancienne pompe à essence pour y attendre des ordres, avaient averti le garde de celle-çi qu'ils en faisaient leur base. Mais celui-çi n'a pas eu confiance et, au lieu de vérifier au téléphone de l'institution, a téléphoné à la police civile, demandant leur intervention. A leur arrivée a eu lieu l'échange de tirs, aucun n'ayant -semble-t'il- tenté d'identifier d'abord les autres.
- Le métro de Santiago a été élu comme le meilleur d'Amérique (Metro Awards) au souper annuel de Metro Rail à Londes.
5-04-2012 - Le Sénat a rejetté trois projets de loi qui voulaient ouvrir la porte à l'avortement avec le qualificatif de "thérapeutique".
- La popularité du président Piñera continue à baisser: elle est maintenant de 29% (-5% en un mois).
6-04-2012 - Ce jeudi soir, il y avait un bouchon de 10km sur l'autoroute de sortie de Santiago vers le sud, vu la quantité d'automobilistes qui sortirent passer le long week-end loin de la capitale. Il fallait 2h30 pour faire 57km. 237.000 automobiles sont sirties de Santiago, dans divereses directions.
- Les senior sont maintenant 10% de la population et on calcule qu'ils seront 20% en 2025. En 1910, l'espérance de vie d'une femme était de 33 ans; elle est maintenant de 82 ans.
- Le rationnement électrique (principalement au moyen d'un baisse de voltage) a été prolongé pour six mois à cause de la sécheresse et du retard de la mise en fonction de deux centrales électriques. Plusieurs grands projets ont des années de retard à cause de procès intentés par les écologistes et la conséquence pourrait être une crise en 2014 ou 2015.
8-04-2012 - Le long week-end de Pâques, il y a eu 50% de moins d'accidents de la route en comparaison à l'an passé. On attribue cela à la nouvelle loi sur l'alcohol au volant.
- La politique de rendre les terres "ancestrales" aux indigènes de l'Araucanie a été un total désastre. Depuis 1993, 155.120 ha leur ont été "rendus". Depuis 2000, le pourcentage d'indigènes qui travaillent dans l'agriculture est cependant descendu de 46 à 35%. Dans une propriété de 650 ha, expropriée en 2000, qui produisait du bétail et du lait, la laiterie a disparu, il ne reste presque plus de bétail et même les arbres qui bordaient les chemins ont été coupés et vendus, de même que ceux des bois. 75.000 hectares de plus sont devenus improductifs dans la région. Le gouvernement actuel a changé de tactique. Les terres sont maintenant données sur la base d'un concours de projets de travail et accompagnés d'un système d'assistance technique qui assure un fonctionnement commercial adéquat.L'association avec des privés non-indigènes est aussi permise et est celle dui conduit au meilleur rendement.
12-04-2012 - Le salaire mensuel moyen d'un chilien est d'environ un tiers du belge: 1021 dollars, contre 3.035 en Belgique (en parité de pouvoir d'achat), légèrement plus bas que l'argentin, qui est le plus haut d'Amérique Latine.
13-04-2012 - Le gouvernement a déjà octroyé 80 concessions de zones où explorer la factibilité d'exploiter l'énergie géothermique. Le pays aurait un potentiel de 16.000MW de ce type d'énergie, soit plus que la capacité des sources actuellement utilisées.
- Le pain normal ne pourra plus contenir plus de 1,5 grammes de sel pour 100 grammes de produit (aujourd'hui, il a 1,75 gr) selon détermination du Ministère de la Santé.
- Alors que le Ministère des Transports continue à planifier des pistes cyclables et même des pakings pour vélos à Santiago, un urbaniste affirme que circuler en bicyclette est un suicide car les chauffeurs ne tiennent pas compte de la possible présence de cyclistes.


Spécial au sujet d'un article de "The Economist"

"Inepte et ineptes"
Par Francisco Javier Díaz
Journal "El Mercurio", 14-04-2012

Le mondialement prestigieux hebdomadaire The Economist, de tendance libérale de renom, a surpris cette semaine avec un rapport détaillé sur la situation sociale et politique au Chili, en donnant un adjectif peu heureux au président Sebastián Piñera: inepte. "Une partie du problème, c'est que M.Piñera s'est révélé être un politicien inepte, une vue qui ne se limite pas à l'opposition," a dit le magazine.

La qualification est dur pour le président, mais l'article ne devrait plaire à personne. Pour les millions de lecteurs de l'hebdomadaire britannique dans le monde -beaucoup d'entre eux politiciens, universitaires, journalistes et leaders d'opinion dans leur pays respectif- ce qu'ils ont lu dans cet article n'est pas Piñera ni l'UDI [un des partis au pouvoir] ni la Concertation [bloc oppositeur] ni l'Alliance [bloc du gouvernement]. Ce qu'ils lisent, c'est le Chili. Et comment une classe politique très riche s'est éloignée de la réalité sociale qui a construit ce pays dynamique, devenant insensible aux inégalités sociales et se réfugiant dans les institutions politiques non représentatives. Pour le lecteur étranger il peut y avoir un plus inepte (Piñera) mais nous sommes tous plus ou moins ineptes.

Qu'il y a eu ineptie politique de l'exécutif, non seulement pour répondre aux demandes sociales, mais aussi pour gouverner en général, il l'a eu. Il n'y a jamais eu de "récit" [projet succint de gouvernement]. La "nouvelle forme de gouverner" [promesse de Piñera], avec parkas rouges, des résultats et non des intentions, celle du 24/7 [réaction au tremblement de terre] est considérée aujourd'hui comme un slogan sans forme ni substance. Les changements de stratégie terminent par mettre dans l'embarras même ses propres fonctionnaires. Si vous pensiez que le contrôle de l'ordre public pourrait faire partie d'une nouvelle histoire -appelée "la doctrine Aysén" [allusion au contrôle des désordres dans le sud]- les zigzags de la Monnaie [le palais du gouvernement] ont enterré cette idée, tandis que la répression policière semble non seulement excessive, mais aléatoire. Le dédain pour les conflits d'intérêts a coûté la tête d'une paire d'autorités et laissé boitante une autre paire. Et les attentes non satisfaites, surtout en matière de sécurité publique, font que de la déception, aujourd'hui, beaucoup passent à la repentance.

The Economist, cependant, essaye d'équilibrer l'analyse et pointe vers quelque chose de plus profond. Il reconnaît que l'économie croît, le chômage diminue et, pour la première fois, quelqu'un autre que le Président ou son ministre de l'Habitat reconnait que la reconstruction après le tremblement de terre progresse à un rythme raisonnable. Rappelez-vous que les pires détracteurs de la reconstruction ont été les parlementaires et les maires de la tendance du gouvernement ("arrêter de mentir", pria une fois un député UDI).

Pour l'hebdomadaire, les causes profondes des troubles sont l'inégalité sociale, l'inégalité dans le système éducatif, les abus que génère la concentration économique et le système électoral. Cela crée un cocktail explosif pour la mobilisation citoyenne.

Le point inquiétant, c'est que l'opposition ne capitalise pas la mauvaise appréciation du gouvernement. Au contraire, on voit un ensemble de chefs de partis muets face aux organisations sociales et qui essayent de sauter dans le train de la première réclamation qui apparaît. Ce n'est pas The Economist qui le dit, mais il est très vrai qu'il y a de l'ineptie partout. Mais pour qu'elle ne s'étende pas partout, ce qui est nécessaire, c'est plus et mieux de démocratie. Plus de concurrence. Plus de canaux de participation. Et non une institutionnalité qui noye toute réclamation citoyenne.

Alors que les sénateurs et les députés se battent publiquement pour leurs assignations [finances], sans être capables d'organiser un système moyennement efficace et collectif d'assistance technique et appui institutionnel -aucun ne veut lâcher ce fil- les citoyens continuent à les voir tous ineptes de façon homogène. De ce jugement ne se sauve qu'une poignée, mais même la légitimité et la popularité énorme de ceux-là ne peut être suffisante pour reconstruire la confiance malade des Chiliens dans leurs politiciens et leurs institutions.