14/03/2017

Mars (a)

1er mars - SimpleData est la seule firme chilienne qui se présente au Mobile World Congress de ces jours-çi à Barcelone. Elle est spécialisée en "solutions" pour entreprises de télécommunications (détection de réseaux WiFi dans la ville, contrôle de visites de techniciens, drones pour voir l'état des antennes, etc.).
- 72.000 emplois salariés ont été supprimés l'an passé, la moitié dans la construction.
- La présidente Bachelet a demandé à la DC et au PC d'abandonner leur "petite bagarre" (pour le cas du refus de Cuba de recevoir l'ex-ministre DC Mariana Aylwin). La présidente de la DC avait dit que la réponse du PC chilien était insuffisante et celui-çi que ce thème "n'intéresse personne". Le ministre de l'Intérieur a demandé aux partis de la majorité de ne pas faire de Cuba un problème de politique intérieure.
- La resquille dans les autobus de la capitale continue a augmenter. Dans les bus d'une des firmes, qui mènent de Puente Alto (secteur sud) au centre, la majorité des voyageurs ne payent plus. Aujourd'hui, la Parlement devrait aborder une nouvelle loi sur le contrôle des resquilleurs. L'an passé, la resquille a provoqué une perte de 150 millions de dollars.
- Les dernières cabines téléphoniques sont retirées du centre de Santiago.
- Le Chili a reculé de 28 positions dans le ranking d'attraction pour des investissements miniers (de 11° à 39°).
- Un groupe économique projette de construire des maisons de "haut standard" dans le haut de Santiago. Chacune coûterait 2 millions de dollars (incroyable!). C'est peut-être pour quelques unes des 3.184 personnes qui possèdent ici plus de 10 millions de dollars.
- La compagnie téléphonique espagnole Telefonica (présente depuis longtemps dans le pays) investira 500 millions de dollars pour améliorer ses réseaux, vu l'emploi croissant d'internet.

2 - La police a arrêté un commerçant chinois qui opérait dans la zone franche d'Iquique (nord) et avait importé de contrebande 236.418 paires de chaussures sportives falsifées, pour une valeur de 10 millions de dollars.
- Le gouvernement a décidé que son ambassadeur à Cuba retourne à son poste, sans autre intervention pour l'affaire Aylwin et sans qu'il y eu de réponse satisfaisante de Cuba face à cette expression de mécontentement, comme on espère normalement dans les relations diplomatiques. Les commissions des affaires étrangères du Parlement ont à nouveau exprimé leur désaccord.
- Le PC a refusé de signer un accord du Parlement en faveur de demander la libération d'un député d'opposition vénézuélien (arrêté dans ce pays). La DC a souligné cette attitude (réclamations pour les droits humains de partisans de gauche, mais pas de l'opposition).
- Le mauvais temps dans le nord a coupé la route qui unit Arica avec la Bolivie (principale voie pour le commerce extérieur de ce pays). En deux mois, il y a plu plus que tout 2016.

3 - Selon l'ONU, les étudiants chiliens sont ceux qui fument le plus de cannabis (chanvre) dans la région (3,6% des étudiants du secondaire).
- Si tous les partis actuels et les nouveaux partis politiques arrivent à inscrire le minimum de partisans requis pour participer aux futures élections, il y en aurait une quarantaine. Il leur sera beaucoup plus difficile de subsister après car, pour cela, il leur faudrait obtenir 5% de la votation. Le Service Electoral a rappelé ces conditions et aussi celles nécessaires pour présenter un candidat à la présidence (que seuls les plus grands partis, présents dans tout le pays, pourraient être en condition de respecter... ce qui ennuye beaucoup de partis de la gauche, très fragmentée).
- Grâce, surtout, à l'augmentation des touristes, les rentrées des bars et restaurants ont augmenté de 13% ces 3 dernières années et arrivèrent à 4.700 millions de dollars l'an passé. En 10 ans, la hausse a été de 37%.

4 - Les communes sont responsables de l'entretien des rues, qui restent pleines de trous car il leur faut obtenir l'autorisation du Service d'Urbanisme pour les boucher. 26 des 34 communes ont bouché les trous (qui peuvent causer une rupture des ressorts des autos ou accidents pour brusque changement de piste) sans attendre ce permis que la bureaucratie peut retarder durant des mois. La Cour des Compte (chargée de vérifier la légalité de tout procédé) a demandé des mesures disciplinaires contre les infracteurs (des communes, pas des bureaucrates du Service d'Urbanisme!).
- L'emploi de chèques n'est plus que de 3% pour les opérations de payement. La carte de débit en concentre 66%, suivie par les transferts (14%) et les cartes de crédit (6%). Presque tous les supermarchés refusent les chèques.
- L'excès de protection des enfants commence (enfin) a préoccuper les psychologues. Les parents tentent de leur éviter tout type de frustration, ce qui aura pour résultat des adultes incapables de tolérer des exigences externes et de valorer l'effort personnel. Quelques collèges commencent (enfin aussi) à protéger et exiger l'autonomie des enfants et leur résolution de défis... et à "rééduquer" les parents.

5 - La satisfaction des "clients" du Registre Civil a été de 87,6% en 2016. Les insatisfaits correspondent à ceux qui ont eu des inconvénients que les fonctionnaires n'ont pu résoudre facilement ou, dans quelques cas, les longues queues et manque de sièges pour attendre. (Beaucoup de démarches peuvent être faites par internet, comme la demande de certificats, ce qui est très apprécié.)
- Les régions administratives du pays, sauf la Métropolitaine, doivent attendre jusque 20 ans pour voir mises en marche leurs oeuvres d'infrastructure les plus urgentes (comme un barrage dans le grand nord et la modernisation ou agrandissement de divers hôpitaux). Les retards se doivent tant à la bureaucratie centrale qu'aux changements de gouvernements (chacun avec des critères différents) et à des réclamations d'habitants voisins que les travaux ennuyeraient.
- La nouvelle concessionaires de l'aéroport de Santiago (Aéroports de Paris) a enfin commencé les travaux du nouveau bâtiment central (celui des quais avait commencé en novembre). Cela a obligé à éloigner les parkings, qui devront être desservis par un car, vu la grande distance. Une première étape serait prète à la fin de l'an prochain et le tout devrait être fini en 2020.
- Les camionneurs d'Araucanie demandent qu'y soit maintenu l'état d'exception qui fut décrété pendant la période d'incendies de forêts, car ils n'ont pas souffert d'attentats pendant ce temps (mais le gouvernement l'a supprimé et il y a déjà eu de nouvelles attaques).
- Tous les ministres et les autoriés régionales ont dû assister hier à classe pour apprendre à faire les entrevues du prochain recencesement. La présidente bachelet y a aussi assisté (mais il n'a pas été dit si elle ira aussi le faire).

6 - La présidente Bachelet est allée aujourd'hui en Araucanie mais seulement pour inaugurer l'année scolaire dans une école. Pas un mot (ni décision) sur les problèmes de la région.
- Il y a juste 50 ans a eu lieu le premier vol depuis la terre ferme vers l'île de Pâques (Rapanui), à 3.750km. Cela a transformé son économie avec l'arrivée croissante de touristes, telle que cela pause un problème écologique. Il y a maintenant 11 vols par semaine, de jusque 313 passagers, et 108.000 passagers y ont débarqué l'an passé, pour une population locale de 6.000 habitants. Ceux-çi réclament une régulation plus sévère du tourisme. Un projet de loi fixant de nouvelles conditions d'entrée et de permanence dort au Parlement depuis un an.
- Le Conseil de Défense de l'Etat a refusé d'admettre un procès pour manque de protection intenté contre l'Etat par les fils du couple Luchsinger brûlé vif dans sa maison il y a deux ans par des mapouches. L'argument est que cette exigence était "impossible de satisfaire dans cette région" et qu'elle "dépasse tout standard raisonable en matière de sécurité publique"!
- Les amendes imposées aux automobilistes en 2016 furent 397.000, le chiffre le plus haut des 5 dernières années. Les plus fréquentes sont pour excès de vitesse et stationner mal.
- Près d'un tiers des travailleurs se méfieraient de leurs chefs et de leurs compagnons de travail.
- Selon une étude de la Chambre de Commerce de Santiago, si l'on calcule le désemploi en terme d'heures travaillées, il se monterait à 11,6% (et non les 6% officiels). Une des raisons serait que les indépendants ne travailleraient que 33 heures par semaine contre 39 heures pour les employés.
- Les investissements dans le commerce sont tombés à leur niveau le plus bas depuis 2014.
- 50% du saumon importé par les Etats-Unis depuis 2010 a été chilien (127.000 tonnes en 2016).

7 - Enquête de février sur les préférences pour les possibles futurs présidents du pays: Piñera 29%, Guillier 25% (et les autres sont loin derrière). L'approbation pour l'actuelle présidente est de 23%.
- Rentrée des classes hier: 24% de plus d'automobiles qu'il y a une semaine circulent à Santiago (1,2 millions). Il y a dans le pays 4 personnes par véhicule (contre 1,3 aux Etats-Unis) malgré que le parc a doublé en 10 ans.
- Nouveau grand scandale: les policiers (carabiniers) chargés des finances de l'institution auraient dévié d'importants fonds vers des comptes de particuliers. On sait pour l'instant de 300 millions de CLP mais il pourrait y avoir eu une perte de patrimoine de 11.000 millions (16 millions d'€) en 4 ans. Huit officiers ont été mis à la retraite ainsi qu'un général, "pour responsabilité hiérarchique", et d'autres ont été expulsés. 45 sujets, entre policiers et civils, seraient impliqués; 17 sont en prison préventive. La fiscalie enquête. L'institution créera une nouvelle unité d'analyse financière.

8 - Neuf des carrières qu'offre l'Université Catholique de Santiago (PUC) sont classées entre les 50 meilleures du monde selon l'index QS. Entre ces carrières: communications et théologie. Selon une autre étude internationale, Santiago est la troisième qui a la meilleure offre d'études supérieures dans la région. Cela peut expliquer que les visas pour études ont augmenté de 28% l'an passé.
- La police a expulsé des occupants illégaux qui avaient pris possession d'une grange en Araucanie. Une communauté mapouche soutient que le terrain lui appartient.
- En 2016, le métro de Santiago a transporté 670 millions de passagers.

9 - La contrebande de fruits de la Bolivie, (par des cols non-habilités) est passée de 9.619 kg détectés en 2014 à 22.960 kg en 2016, ce qui introduit dans le pays -dans la région d'Iquique- des larves de mouches des fruits, dont le pays est libre depuis 1995, avec le risque qu'elle infecte la production locale (faisant perdre les marchés internationaux). De nouvelles barrières fitosanitaires ont été mises en place et 200 nouveaux inspecteurs ont été envoyés dans le nord.
- Le ministre des Finances a déclaré publiquement que le "monde politique" ne montre aucun intérêt pour la croissance économique du pays.
- Les exportations de vin en bouteilles ont augmenté de 19% en janvier en comparaison au même mois de l'an passé.

10 - Plus de la moitié des enfants de 1ère année souffrent de poids excessif, le double d'il y a 20 ans.
- Le ministère des Transports a mis en étape de test pour quelques semaines dans le centre de Santiago un nouveau bus, avec étage et air conditionné, comme les plus modernes de Londres. Si l'évaluation finale est positive, ce type de bus pourrait remplacer les bus articulés, qui sont arrivés à la fin de leur vie utile.
- Le Conseil National de Télévision commence la licitation des dernières fréquences encore disponibles destinées à la nouvelle télévision numérique terrestre. Elles sont 116 pour tout le pays et 40% devront être exclusivement régionales. 849 fréquences avaient déjà été assignées (Chaque fréquence couvre une extension géographique très limitée, ce qui explique cette quantité. Le canal TVN, par exemple, a 238 fréquences pour couvrir le pays.). La norme est la japonaise adaptée au Brésil pour l'Amérique du Sud (ISDB-T), différente de l'américaine (ATSC) et de l'européenne (DVB-T). L'extinction de la télévision analogique a été reportée de 2018 à 2020.
- Les organes politiques (secrétaires ministériels régionaux) de la Région de Coquimbo ont repoussé l'autorisation d'y ouvrir une nouvelle mine dans une zone fortement déprimée, malgré les rapports techniques favorables. Il y aurait eu pression du ministère de l'Intérieur et d'un sénateur. L'ex-président Piñera avait participé au projet mais seulement en 2009-2010 (raison de l'opposition?). La nouvelle mine, de fer et cuivre, aurait pu donner du travail à 9.800 personnes et divers bénéfices pour la commune (comme asphalter ses routes, qui ne sont que de terre, et mettre des égouts).

11 - Les investissements sont tombés de 8% réels l'an passé en comparaison avec 2013 (fin du gouvernement Piñera) et le taux actuel est le plus bas de la dernière décade. Alors que PIB avait crû de 5,3% sous Piñera, il a crû maintenant de 2,9%. Pour le ministre de Finances, la cause serait seulement une baisse des exportations (par fin du "boom" minier), ce qui est difficile à croire.
- The Dayly Telegraph a classé le Chili comme la meilleure destination pour le tourisme-aventure, grâce à la diversité de sa géographie.
- Ayant accompli 3 ans de gouvernement, la présidente Bachelet a défendu les "succès" obtenus: "l'augmentation de la protection et les opportunités, garantisant l'inclusion et les droits citoyens, dans une démocratie qui perfectionne la participation et la transparence; plus de gratuité en éducation supérieure, augmentation des pensions [de base], agenda de probité, diminution de la pauvreté, Accord d'Union Civile [casi-mariage pour homosexuels] et aide en médicaments pour maladies rares.". La droite, pour sa part, a fait remarquer le manque de respect des promesses sur les thèmes qui intéressent le plus la population: l'économie, l'emploi, la santé, la sécurité, la qualité de l'éducation publique.

12 - Si en 2006 la proportion d'appartements était de 34% des résidences privées, elle est maintenant de 57%. Les buildings sont de plus en plus fréquents même dans les petites villes. Leur superficie moyenne varie entre 63m2 (région d'Atacama) et 114m2 (région métropolitaine). Le principal motif de la préférence est la proximité avec le travail.
- Hier soir, Charles Aznavour, à 92 ans, a fait un récital de 90 minutes dans un théâtre de Santiago.
- La grève dans la grande mine de cuivre Escondida, de l'australienne BHP Billiton, a déjà passé le mois. Malgré que les travailleur gagnent en moyenne 60.000 dollars par an, plus 20.000 dollars en bénéfices divers (frais de santé, études des enfants,etc.), ils exigent une hausse de salaire et un "bon de fin de conflit" de plusieurs millions de CLP pour chacun. Jusqu'à présent, l'employeur n'avait pas voulu plier mais offre maintenant d'étendre les bénéfices extra-salaire aux épouses et finirait par accéder à une légère augmentation. Offre à nouveau repoussée.
- Vu leur difficulté pour réunir un nombre suffisant de militants, plusieurs partis ont maintenant recours à des "call centers" pour inviter par téléphone à s'inscrire. Les "invités" ont commencé à réclamer dans leurs réseaux sociaux pour avoir été contactés par des partis avec lesquels ils ne sympathisent pas.
- En 2016, 177 délinquants chiliens ont été expulsés des pays où ils "travaillaient", principalement l'Espagne, le Canada, l'Angleterre et l'Italie.
- Il n'y a que 8.000 chiliens résidant à l'étranger qui se sont inscrits pour voter aux prochaines élections (de 450.000 habilités).
- Un nouvel incendie de forêt, à la périphérie de Viña-del-Mar (Valparaiso), a détruit 16 maisons et 450 ha de plantations.
- 19 camions, 9 remorques et un hangar ont été incendiés en Araucanie. La perte est de 6 millions de dollars. Le gouvernement local a annoncé un procès "contre les responsables" (sans préciser qui, alors que la CAM a laissé une banderole s'en adjudicant la responsabilité) et pourrait invoquer la loi antiterroriste, mais s'y résiste. Les camionneurs demandent une fois de plus que soit appliqué l'état d'exception qui permettrait aux militaires de patrouiller, mais le gouverneur de la zone s'y refuse. Le ministre de l'Intérieur a promis de s'y rendre. Les parlementaires et associations de la zone se demandent pourquoi le gouvernement ne déclare pas la CAM (un des deux groupes revendicatifs) association illégale et ne l'attaque pas en justice quand elle revendique un attentat.

13 - Le Chili est le pays latinoaméricain qui a le plus de prévalence des maladies cardiaques (mais elles ne sont pas ici les premières comme cause de décès).
- Il reste 18 jours pour que les employés publics (d'un certain niveau) publient leur déclaration de patrimoine et intérêts, selon la nouvelle loi de probité. Seuls 10.000 des 60.000 affectés l'ont déjà fait.
- La participation du Chili dans le marché international du cuivre a été de 26,9% en 2016, une baisse de 8,4% en 10 ans.
- Le Chili prétend entrer sur le marché du café avec une plantation en île de Pâques. La semence y était arrivée au XIXe siècle mais n'avait pas été exploitée commercialement.
- La confiance des consommateurs, dans l'Indice de Perception de l'Economie, a continué à baisser, de 2,2 points le dernier mois et 5,6 points en un an.

14 - Aujourd'hui et demain se réunissent à Viña-del-Mar les représentants des pays qui avaient signé (mais pas encore mis en oeuvre) le Traité Trans-Pacifique (TPP) de libre-commerce, duquel le président Trump a décidé de retirer les Etats-Unis, pour étudier comment ajuster le traité et avancer dans un système de commerce unissant les pays de l'Asie, de l'Océanie et de l'Amérique sans les Ettats-Unis.
- La présidente Bachelet a signé et envoyé au Parlement un projet de loi qui créerait une Agence de Protection des Données Personnelles et règlementerait l'utilisation de celles-çi. Le projet établit que chaque personne est propriétaire de ses données et les entreprises devront, par exemple, compter avec l'autorisation de leurs clients pour passer ces informations à des tiers.
- Face aux conflits croissants avec les syndicats, les compagnies minières augmentent leur dotation de véhicules autonomes et autres systèmes automatiques. Elles pourraient arriver a réduire de moitié leur personnel dans divers secteurs, mais il pourrait y avoir un manque de techniciens qualifiés, les carrières techniques étant peu appréciées par les jeunes qui sortent du secondaire (et veulent tous postuler aux universités).
- Les compagnies locales de télévision par cable ou satellite commencent à se préoccuper du succès de la formule de la télévision numérique à la demande par internet (surtout Netflix). Ainsi, une première compagnie (Entel, nationale) a fait alliance avec Netflix, et une autre (Claro, internationale) a créé sa propre plateforme de vidéo à la demande (VOD).

Extra: La racine du mécontentement (Extraits)
Par Juan Carlos Eicholz, professeur Univ. Adolfo Ibañez (Journal El Mercurio, 5/3/2017)

La racine du mécontentement n'est pas la même chose aux États-Unis et au Chili. Dans les deux cas, cependant, et comme toujours socialement, le mécontentement se traduit en critique acide à l'establishment. qui précède tout changement d'ère. Et non seulement acide, mais aussi dévastatrice, parce que les technologies de l'information d'aujourd'hui donnent aux gens un pouvoir comme jamais auparavant, mettant en cause l'existence même de la démocratie représentative.
Et, bien sûr, derrière cette critique de l'élite s'incube la méfiance. La division entre «eux et nous» commence à devenir de plus en plus profonde, renforcée par le phénomène de la "postvérité" [le mensonge sur le net], qui fait que chacun s'informe dans les réseaux sociaux des plus proches, écoute seulement ceux qui confirment leurs propres croyances et assemble des constructions qui permettent de soutenir que «nous sommes les bons et eux les mauvais».
La critique de l'establishment et la méfiance sont des expressions communes de mécontentement social, mais la racine est différente: la mondialisation aux États-Unis et "le modèle" [de société] au Chili. Là-bas ce qui est déclenché c'est l'effet tribal; ici, le syndrome des abus.
Ceux qui se sentent abusés (maltraités), une fois qu'ils parviennent à faire entendre leur voix -et les réseaux sociaux offrent cet espace aujourd'hui-, veulent se venger et avoir l'assurance que de tels abus ne seront pas répétés. Comment parvenir à cette sécurité? Abandonnant le "modèle". Et tout qui ne fait pas partie des agresseurs et offre cela sera applaudi et deviendra un champion. Comme Guillier [le pré-candidat de la gauche]. Au Chili, cependant, Trump serait considéré comme l'un des agresseurs.
La mondialisation est synonyme d'intégration, ce qui suppose plus de conscience de l'autre. Aller dans cette direction est un progrès; s'imposer et nier l'autre, comme le fait Trump, c'est échapper aux défis auxquels nous sommes confrontés en tant qu'humanité.
Le modèle a été un pas en avant dans l'évolution du Chili, qui a également entraîné de l'incertitude et de la perte pour beaucoup, en particulier pour ceux qui ont cru et se sont sentis trahis. Prétendre la fin du modèle est retourner aux années 60, tombant prisonnier de la nostalgie selon laquelle le passé était mieux. C'est ce que beaucoup projettent pour Guillier, ne réalisant pas que, ce faisant, ils se soustraient au défi que connaît le pays. Quel est le défi? Humaniser le modèle et l'adapter à ce qu'est le XXIe siècle, se nourrissant de la méritocratie et de la diversité afin de parvenir à ce qui est bon pour tout le monde et pas seulement pour quelques-uns.
A la concurrence, il faut ajouter la collaboration, l'efficacité, l'innovation, le commandement et le contrôle, la confiance et la transparence; à la tâche, le sens, l'homogénéité, l'hétérogénéité, la rentabilité individuelle, la valeur des actions.
En fin de compte, si nous comprenons la racine du mécontentement, non seulement on sait que Trump ne serait pas élu dans ce pays, mais ni Trump est la solution aux États-Unis ni Guillier l'est au Chili. En regardant un peu plus loin, nous savons que les deux nous mènent à éluder les problèmes sous-jacents au mécontentement.
Pas plus de socialisme
par Axel Kaiser (économiste) (Extraits; Journal El Mercurio, 7/2/2017)

Lisez bien les déclarations suivantes: "Le but historique socialiste reste le renversement du capitalisme, mais il n'est plus un objectif qui doit être atteint le plus rapidement possible, mais qui donne un sens à l'action politique. Le socialiste d'aujourd'hui n'a pas de réponse à la question de savoir comment organiser une société sans le capitalisme, mais il sait dans quelle direction se déplacer et ce que signifie être à la recherche et construire une rationalité supérieure et différente de celle du capitalisme". Ce sont les mots d'Atria, un des candidats socialistes [et conseiller de Bachelet].
La chose intéressante est que, contrairement aux socialistes précédents, ceux d'aujourd'hui admettent qu'ils ne savent pas quoi offrir comme alternative. Ils savent seulement que ce qu'il n'y a ne leur plait pas et expliquent que ce qu'il faut c'est de le démanteler pas à pas. C'est donc un socialisme qui promet une société plus humaine, plus juste et avec plus de sécurité économique, mais il n'ont aucune idée de comment y arriver.
Pour changer, ces socialistes insistent sur le fait que l'inégalité a augmenté et que la richesse est demeurée essentiellement dans les mains de quelques-uns, problème que des études mondiales et locales réfutent complètement. Cela, sans parler de la réduction de la pauvreté mondiale et nationale grâce au capitalisme, qui, comme le dit McCloskey, une fois aussi un socialiste, est tout ce qui doit nous importer. Et ne vous méprenez pas, parce que ce que recherche ce socialisme ce n'est pas la social-démocratie européenne, mais quelque chose de beaucoup plus radical.
Où sont donc les points de référence pour ce que cherche ce secteur de la gauche chilienne? Ni plus ni moins que le Vénézuela de Chavez, l'Argentine de Kirchner, Correa en Equateur et Evo Morales en Bolivie. Le modèle chaviste [vénézuélien] du socialisme du XXIe siècle est ce qu'une part croissante de la gauche chilienne propose pour notre pays.
Si vous pensez que ce sont de simples idées qui n'auront pas de grands effets pratiques, cela signifie que vous ne comprennez pas ce qui est en jeu. Car c'est de ce démantèlement pas à pas du système de marché qu'Atria parle avec Bachelet et qui continuera certainement avec Guillier ou tout gouvernement héritier de la "Nouvelle Majorité".

Les 1.000 jours de Bachelet
par Carlos Peña, rector Université Diego Portales (Extraits; Journal El Mercurio, 12/3/2017)
Ceci est plus que suffisant pour offrir une certaine physionomie, un ensemble de fonctionnalités desquels, quand on regardera le temps avec de la distance, on se souviendra.
Depuis que la démocratie a été récupérée, aucun gouvernement n'avait montré l'appétit pour le changement qu'a le deuxième gouvernement de Bachelet. Avant elle, tout avait été plus ou moins compatible avec l'inertie modernisatrice du marché et on avait suggéré modérer certaines de ses lacunes. Bachelet, par contre, a été la première à suggérer de changer le caractère pleinement contributif de la modernisation par une vision universaliste des droits dans certains domaines clés. Si dans le système contributif chacun reçoit en raison d'avoir déjà apporté, dans le système universaliste on reçoit en raison d'être un membre de la communauté politique. Quelque chose comme cela ne supprime pas le marché; simplement il le corrige.
Très sensé. Mais malheureusement, ce qui est raisonnable dans une ambition politique transformatrice, dans les mains des intellectuels qui gagnent leur vie pas exactement par la pensée, mais donnant des idées, rédigeant des rapports et rédactant des discours, cela se transforme souvent en diatribe. Les intellectuels soufflant leurs conseils à l'oreille du pouvoir cherchent des concepts justifiant la décision politique, ce qui fait alors que lorsqu'on leur demande de justifier un projet de changement, ils se mettent généralement à la recherche d'hypothèses plus abstraites, hautes et invérifiables, jusqu'à terminer de perdre tout contact, ou presque tout, avec la réalité. Et quand ils descendent à la recherche de celle-çi, ils ne peuvent la trouver.
Voilà ce qui est arrivé à Bachelet dans ces mille jours. Les pathologies de l'élan transformateur correct de la modernisation est soudainement devenu de la mauvaise sociologie et s'est éloigné de la réalité.
Où les gens voient une expérience d'autonomie et d'amélioration matérielle, le gouvernement et ses représentants voient une simple "marchéisation" de la vie; et où les gens jouissent de la liberté tout en souffrant de ses inquiétudes inévitables, le gouvernement et ses représentants voient un malaise qui est une aspiration à de la communauté et de la cohésion.
Bien sûr, ce sont les personnes qui se trompent. Parce que l'une des caractéristiques du diagnostic de l'intellectuel qui souffle ses secrets à l'oreille du pouvoir, c'est qu'il est irréfutable, car toutes les données à effet contraire sont expliquées par ce même diagnostic.
Ainsi, l'impulsion transformatrice sensée risque de permettre que la droite gagne pour la deuxième fois [les élections] en un quart de siècle. Quelque chose qui n'avait pas eu lieu au long du XXe siècle. Nous devons l'admettre: tout un exploit pour seulement mille jours.