30/04/2020

Avril (b)

Santé
- Il y a toujours des réclamations des bourguemestres qui désirent l'application chez eux de la quarantaine totale. Ils ne comprennent pas les calculs (complexes) faits au ministère de la Santé pour prendre la décision. A côté: les zones de Santiago en quarantaine en cette fin de mois.
- Les communes s'occupent d'envoyer à domicile les médicaments des patients de maladies chroniques (qui allaient les chercher eux-même).
- Le réseau de santé de l'Université Catholique du Chili (Santiago) offre maintenant des consultations par vidéoconférence (consulter le médecin de chez-soi). D'autres centres médicaux commencent aussi à les offrir.
- Le ministère de la Santé donne une carte d'identité sanitaire a ceux qui ont souffert de la maladie et sont ensuite "non-infectants", ce qui les libèrerait des mesutes de restriction. Il en sera de même pour les travailleurs de la santé (testés tous les 15 jours) qui démontrent la même condition. Par après, tout le monde pourra demander de se faire le test. (Il y a une discussion si cela signifie immunité ou non; non selo la OMS.)
- Il y a maintenant plus de 50 laboratoires capables de faire les tests PCR de détection du virus, répartis dans tout le pays, et plus de 11.000 tests possibles par jour.
- L'emploi de masques (couvre-bouches) est maintenant obligatoire dans tous les commerces, les ascenseurs et lieux publics fermés. Mais comme des communes les imposent aussi en lieux publics ouverts (rues), il faut donc les porter toujours. Ne pas le porter signifie une amende de 2,5 millions de CLP (2.500 €).
- Dans les queues pour entrer aux supermarchés, pharmacies, banques, etc. personne ne respecte l'obligation de maintenir 1 m. de distance, et ceux qui réclament risquent d'être insultés! Les annonces de quarantaine totale (habituellement à partir de 2 jours plus tard) dans des secteurs où la contagion est haute déclenchent automatiquement une avalanche d'acheteurs pour faire des provisions. Ils préfèrent courrir le risque de se contagier dans ces aglomérations au lieu de requerir l'autorisation pour faire des achats normaux dans les jours suivants! 84% des chiliens signalent pourtant qu'ils croient que l'on n'a pas assez conscience de la gravité de la situation.
- Le ministère de la santé a lancé "CoronApp", une plate-forme disponible pour les systèmes d'exploitation Apple iOS et Android, principalement dirigée aux personnes contagiées ou proches de contagiés, où elles peuvent accéder aux informations officielles sur le virus, surveiller leur quarantaine, auto-évaluer leurs symptômes si elles ont des doutes ou collaborer pour prévenir de nouvelles infections.
- Le test PCR est appliqué sans attendre la demande de personnes qui doutent de leurs symptômes dans des cas de "surpeuplement" comme celui des maisons de repos, prisons et taudis surpeuplés d'immigrants, pour éviter des "explosions" locales de la contagion (déjà observée dans plusieurs maisons de repos et des résidences de haïtiens). Les haïtiens se plaignent de discrimination: les réactions xénophobes augmentent à cause de leur piètre higiène; beaucoup ne comprennent pas encore l'espagnol et ne suivent pas las instructions sur les précautions sanitaires. Des citoyens chinois ont aussi été stigmatisés.
- Des communes ont commencé a installer des éviers pour se laver les mains et un tunnel où est pulverisé un désinfectant, au travers duquel il faut passer pour accéder au marché (dont le périmetre est fermé). Des centres commerciaux installent aussi ce système et l'un d'eux (sans grandes surfaces) vient d'être ouvert dans le haut de Santiago.
- Environ 800 travailleurs de la santé sont en quarantaine, affectés par la contagion. Le ministère de la Santé offre des places pour les remplacer.
- Les hôpitaux et cliniques, n'ayant pas été saturés de malades, pourront reprendre les chirurgies suspendues mais seulement des cas plus urgents et avec une seule nuit d'hospitalisation (Il y a 13.000 chirurgies en attente).
- A cette date, un total de 16.025 personnes ont été contagiées (inclus les asymptomatiques détectés), 227 sont mortes (infection vérifiée) et 8.500 se sont récupérées. 429 patients sont actuellement en unités de soins intensifs. Le nombre de récupérés dépasse maintenant celui des "actifs" (malades actuels). On a fait 6.288 tests par millon d'habitants, le taux le plus haut de la région. 80% des cas détectés sont renvoyés chez eux car ils n'ont pas ou peu de symptômes (mais doivent y conserver une quarantaine de 15 jours). 166 communes se maintiennent libres du virus (2,7 millions d'habitants, qui sont seulement 14% de la population du pays).
- Graphique de progression de la contagion (cas confirmés par jour)

- Carte des restrictions selon les pays d'Amérique latins (des moins restrictifs -clairs- aux plus "durs" - foncés)  de www.bbc.com:


Politique
- La gestion du ministre de la Santé est qualifiée de mauvaise par 65% des chiliens.
- L'approbation de la gestion de Piñera est montée à 25%.
- Un sénateur de gauche a dénoncé qu'il y a un secteur de l'opposition "dont l'objectif semble que les choses marchent mal pour le gouvernement indépendament des conséquences". Il y a 140 recours judiciaires contre le président Piñera, le ministre de l'Intérieur et le ministre de la Santé pour la façon dont ils ont abordé l'épidémie ou les conditions d'amnistie partielle pour les prisonniers. Seulement 15% ont été admis à considération par les tribunaux et seront probablement rejettés car "régler les politiques publiques n'est pas du ressort de la justice".
- Les manifestations de protestation, en reprise des réclamations sociales, ont recommencé, bien qu'avec peu de participants (moins de 200 personnes), dans plusieurs villes. On estime qu'il s'agit d'anarchistes qui se mettent d'accord par les moyens sociaux. Ils sont rapidement dispersés par les canons à eau de la police, qui procède aussi à en arrêter quelques uns pour infraction des ordonnances de santé.
- Un groupe de parlementaires de gauche a introduit un projet de loi pour éliminer les fonds de pension (d'éparge individuelle) pour les remplacer par un "fond solidaire" unique. Il a peu de chances d'avancer.

Economie
- Les ventes d'articles technologiques pour le foyer ont augmenté notablement (jusque 500% sur une plateforme de ventes par internet): robots-aspirateurs, machines à faire du pain ou de la soupe, friteuses, waffleuses, etc.
-Plus de 80.000 entreprises se sont inscrites pour appliquer la loi de protection du travail (suspension temporaire du contrat de travail, leurs employés passant à dépendre du fond de chômage mais l'employeur paie les lois sociales). Des autres entreprises, 2/3 fonctionnent au-dessous de 25% de leur capacité. En mars, il y a eu plus de 298.000 remerciements et en avril plus de 500.000 sont passés à la suspension temporaire. Le désemploi a augmenté de 8,2% au premier trimestre.
- Le gouvernement a commencé à étudier la "remise en route" des activités commerciales et productives arrêtées ainsi que l'éventuel retour des élèves aux écoles (après le "peak" de contagion attendu dans les prochains jours). Il est maintenant clair qu'il faut concevoir une nouvelle "normalité", établissant de nouvelles conditions de travail dans tous les secteurs. Le président Piñera est apparu en chaîne de TV pour en indiquer les principales lignes, mentionnant l'existence d'un "protocole" qui fixerait les conditions physiques (adaptation des lieux) et sociales (distances, contacts, etc.) et demandant le retour progressif des employés publics qui, pour le moment, "travaillent" à distance, retour objecté par les syndicats et même les partis de droite, et considéré prématuré par le Conseil de la Santé. Finalement le début du retour fut reporté à la fin mai.
- La grande papeterie nationale (CMPC) fabriquera de 1 à 3 millons de masques par mois, qui seront destinés aux centres de santé. La famille d'un important homme d'affaire a fait donation d'un millon de masques pour le personnel de santé, qu'il a fait venir par avion.
- Il y a un "marché noir" de prêts informels avec un taux d'intérêt qui peut atteindre 120% par an. (La loi fixe un maximum de 33,8%.) La dette moyenne des foyers a atteint 75% de leurs rentrées; 40% en prêts hypothécaires, 18% en crédits à la consommation et 17% en autres crédits.

Religion
- Lorsque l'épidémie est apparue, l'Église Catholique a émis une instruction générale qui élimina le salut de paix et ordonna de ne donner la communion que dans la main. Mais, depuis lors, il n'y a plus eu d'instruction ni de la Conférence Épiscopale ni de l'archevêché de Santiago (et très peu en province, selon la presse). J'ai visité les sites web de la Conférence Épicopale: aucune référence à la situation. Sur le site de l'archevêché de Santiago, il y a seulement une liste des paroisses qui transmettent une messe (dimanche ou jour de semaine) par internet (Facebook, Instagram ou Youtube) et référence aux habituelles messes dominicales sur 2 canaux nationaux de TV, où elle ne dure que 25 minutes (on y élimine la première lecture et l'oraison des fidèles, le sermon ne durant pas plus de 5 minutes). Pas d'instructions non plus sur le site de ma paroisse, à part l'information de ce que les messes dans les chapelles sont supprimées mais reste la messe de chaque soir au siège paroissial et celles du dimanche à 9 et 12 heures. Et on ne dit pas qui peut y assister (il faut rappeler que les réunions de plus de 50 personnes sont interdites partout).  La messe de midi du dimanche est transmise sur Facebook. Et rien n'est dit pour les autres activités paroissiales, dont apparait la liste et la description habituelle (Supposons que les participants ont été informés directement.) Apparait même la liste des clubs de seniors avec le jour et l'heure de réunion, alors que ces réunions sont interdites depuis le début!
L'Université Catholique de Santiago vient d'annoncer sur son compte de Twitter qu'elle transmet sa messe du dimanche à 13 h. sur Youtube. Au moins, pour les messes, ont peut trouver où les suivre, mais pour le reste, les catholiques nagent donc dans la désinformation et ont dû faire des déductions à partir des recommendations du ministère de la Santé.

Sécurité
- Alors que la police parle d'une diminution des délits, les bourgmestres se plaignent du contraire et de nombreux habitants signalent la multiplication des vols et de la vente d'alcohol et de drogue durant le couvre-feu, avec absence de contrôle.
- Il y a 18 procès contre des gens qui "ont créé des risques pour la santé publique" (violent leur obligation de se maintenir en quarantaine pour être contagiées). Le gouvernement prépare un projet de loi pour augmenter les sanctions dans ce cas, qui sont déjà assez dures (de 1.000 à 10.000 € d'amende et de 61 à plus de 500 jours de prison, selon les cas et les éventuelles récidives).
- Une nouvelle loi commute la prison par la détention à domicile pour plus de 1.300 condamnés pour délits non violents, pour réduire les risques de contagion en prison.
- Des feux d'artifice ont éclaté le même jour à la même heure en divers points de Santiago. Cela indique normalement l'arrivée de drogue. Aucune arrestation n'a été informée. Où sont les contrôles?

Transports et Communications
- Les réclamations contre les telecoms pour mauvais service ont presque doublé, conséquence indubitable de l'augmentation de la demande pour télétravail (et streaming de vidéos).
- Les frontières fermées de pays de la région ont provoqué de graves problèmes pour leurs résidents ou touristes présents ici: il y a enviton 400 colombiens qui veulent rentrer chez eux et n'ont pu le faire malgré qu'un avion était venu les chercher, n'ayant pu payer le prix du ticket (400 € par personne) et n'ont plus où loger; de même près de 400 boliviens, la plupart venus pour travailler aux récoltes, ont passé plusieurs nuits face à leur consulat à Santiago, qui est "fermé jusqu'à nouvel ordre", alors qu'il devrait leur donner un laissez-passer pour rentrer chez eux. Ils seront transportés à Iquique, pour être près de la frontière, où ils s'uniront à 300 autres qui attendent l'autorisation, au grand dam du bourgmestre local, qui ne sait quoi faire avec eux.

Education
- Les écoles ont été en vacances pour 15 jours. Après, elles reviennent aux classes à distance mais on étudie les conditions d'un retour progressif à l'assistance normale, mais cela semble compliqué car les experts recommandent qu'il n'y ait pas plus de 20 élèves par classe, alors qu'il y en a généralement 40. Seulement 32% des écoles publiques ont des locaux adéquats. Leur faire maintenir la distance est aussi compliqué.
- Le ministère de l'Education, avec l'appui de l'Université Catholique et l'Université du Chili, a lancé un canal numérique de TV éducative, en appui aux classes à distance. Il part avec la reproduction de programmes archivés. Mieux s'ajuster au programme scolaire et créer de nouveaux contenus devra se faire peu à peu.
- Le conseil des recteurs d'universités calcule une perte de 140.000 millions de CLP (140 M d' €) à cause de la suppression et remplacement des classes normales.
- Le Chili est un des 4 pays latinoaméricains reconnus pour une stratégie adéquate d'éducation à distance. Sa plateforme pour les jeunes de 4 à 13 ans a été mise à disposition des autres pays (reconnu par la Banque Mondiale).

Science et environnement
- Le pays accumule les 10 années les plus sèches depuis qu'on enregistre cette donnée (1915), mais on estime même que c'est la pire sécheresse des 700 dernières années. L'été de Santiago a été le plus chaud des 70 dernières années. Photo de l'état d'un barrage près de Santiago.

EXTRA: Les castors dévastent la Patagonie chilienne (Extraits)
(Euronews, 21/4/2020)
Dans les paysages spectaculaires et magnifiques de la Patagonie chilienne, à l'extrême sud du pays, une espèce étrangère cause de terribles dégâts. Il dévore les arbres indigènes, détruit l'écosystème et détruit la flore et la faune. Cette espèce est le castor.
Au milieu du XXe siècle, des militaires argentins ont amené à la Terre de Feu dix couples de ces animaux amicaux dans le but de développer une industrie de la fourrure. L'industrie n'a pas prospéré, mais les vingt rongeurs, sans prédateurs naturels, se sont multipliés pour devenir 100.000 et pénétrer dans la partie chilienne de l'archipel. Un vrai fléau qui détruit tout.
"La forêt n'a aucun moyen de se défendre, le castor ronge l'écorce, car c'est la partie riche de l'arbre dont il se nourrit, et il tue les arbres pour construire ses barrages, ses lagunes, et il inonde les vallées et les forêts et tue tout", dit un habitant de l'île Navarino, qui les chasse. "Les gens qui sont des animaliers, je les comprends, mais malheureusement si nous ne prenons pas de décisions concernant le castor, nous allons être laissés sans forêt, nous allons être laissés sans végétation".
Les dommages causés aux forêts indigènes sont particulièrement préoccupants. Les lengas et les coihues, vieux de plusieurs siècles, sont leur collation préférée. Des écosystèmes uniques au monde. Les autorités chiliennes estiment que les castors ont déjà dévasté plus de 23.000 hectares de forêts indigènes, en plus de causer de graves dommages à la flore et à la faune et des pertes économiques estimées à plus de 62 millions de dollars. [Ils ont de plus réussi à traverser le Détroit de Magellan et s'attaquent maintenant aux bois du continent.]

Carabiniers: les raisons de la crise et la nécessité d'une réforme (Extraits)
(Deutsche Welle, 28/4/2020)
La police chilienne fait face à un moment critique. A l'occasion de sa fête nationale, alors qu'elle fête ses 93 ans d'existence, l'institution est fortement remise en cause. Bien que sa fonction d'ordre et de sécurité au milieu de la pandémie de coronavirus lui ait donné du souffle, ses actions des derniers mois, marquées par de la violence répressive et des violations des droits de l'homme, ont fini par faire sombrer une image qui s'affaiblissait déjà. Selon l'enquête du CEP, alors qu'en août 2015 la police chilienne avait une approbation de 57%, en janvier 2020, elle n'était plus que de 17%.
Qu'est-il arrivé à l'image de l'institution ordonnée, disciplinée et sans les traits de faiblesse que montrent les autres policiers du continent? Parmi les événements qui ont fait la une des journaux ces dernières années, il y a une fraude à grande échelle de plus de 35 milliards de pesos (plus de 37 millions d'euros), qui a entraîné la condamnation de plusieurs officiers, dont des représentants du haut commandement. Un autre scandale a été l'opération "Ouragan", une manipulation de preuves contre des dirigeants mapouches, ainsi que le cas de Camilo Catrillanca, un autochtone dont la mort aux mains de la police a été tentée d'être dissimulée. La goutte qui a fait déborder le verre a été la violence répressive et les violations des droits humains commises par les carabiniers lors des manifestations qui ont eu lieu le 18 octobre dernier et les jours suivants.
L'explosion sociale a révélé les problèmes de formation et le manque de professionnalisme et de capacité des carabineros à maintenir l'ordre, ce que certains critiques et universitaires avaient déjà dénoncé. La police chilienne est dépassée depuis au moins 20 ans. Grâce au fait qu’elle a longtemps bénéficié d’un haut niveau d’approbation et a été considérée comme la meilleure police d’Amérique Latine, elle fut transformée en une institution intouchable, que la classe politique n’a pas eu le courage de questionner ou réformer.
Le 17 mars, le gouvernement du président Sebastián Piñera a présenté un projet de réforme des carabiniers, qui comprend des propositions d'une commission de différents secteurs politiques et universitaires et se concentre sur des questions telles que les droits de l'homme, la transparence et la modernisation. Elle devrait cibler les questions administratives, telles que la gestion de l'argent, l'honnêteté et la transparence, ainsi que la formation, revoir la répartition de la dotation sur le territoire et la manière de mesurer le succès ou l'efficacité, jusqu'ici focalisée sur les délits à plus forte connotation sociale, qui sont ceux des pauvres contre les riches.
Il faudrait aussi renforcer le contrôle interne des fautes commises par la police, en créant un service des affaires internes doté d'une indépendance professionnelle et d'une autonomie d'enquête. Au niveau de la formation, réduire la distance entre les sous-officiers et les officiers. Les experts conviennent que le processus sera long et prendra plusieurs années.
Le processus est en cours, mais une fois que les restrictions concernant le coronavirus seront levées, les carabiniers seront confrontés à un nouveau test. "La crise sociale post pandémique va être bien plus grande que celle qui a conduit à la flambée sociale d'octobre dernier. La grande lutte citoyenne pourrait venir dans les prochains mois et avec une force de police qui n'a pas pu se réformer, il est très probable que nous verrons des niveaux plus élevés de violations des droits de l'homme et de la perte de légitimité", prévient un expert.

14/04/2020

Avril (a)

Santé
- Le demande de sauf-conduits pour se déplacer dans les communes en quarantaine totale ayant atteint 300.000 par jour (au début du mois), on y a limité les autorisations de sortir faire des achats à 2 fois par semaine. On a découvert que beaucoup les utilisaient de façon indue. Ceux qui respectent l'ordre de ne pas sortir se plaignent de voir beaucoup de gens dans les rues et du peu de contrôle militaire. Les irresponsables ne manquent pas, allant faire des achats ou faire du sport étant infectés (il y a même eu des récidivistes, arrêtés 2 fois par la police) et un infirmier contagié qui a vacciné 300 personnes contre la gripe! Des jeunes se réunissent aussi pour faire la fête pendant le couvre-feu (et les délinquants pour voler).
- La mesure de quarantaine totale (confinement) a été suspendue dans quelques communes et instaurée dans d'autres, selon l'évolution du nombre de cas. Temuco (Araucanie) est la ville où il a été le plus difficile de convaincre les habitants de respecter le confinement obligatoire: on a compté jusque 8.000 personnes se promenant à sa grand-place. Avec Arica, c'est la région où il y a, proportionnellement, le plus de contagiés en ce moment.
- Seul le test PCR permet de vérifier l'infection de COVID-19. Mais il doit être analysé dans un laboratoire spécialisé, qu'il n'y a pas dans toutes les villes. Dans au moins quatre régions du pays, moins de tests COVID-19 ont été effectués que ceux établis par les protocoles du ministère de la Santé, en raison du manque de fournitures pour tester tous les cas suspects de contagion. Il y a des "tests rapides", qui n'ont pas ces exigences mais vérifient seulement la présence d'anticorps (réaction immunitaire) ou d'antigènes (présence de composants du virus), mais ne servent pas pour diagnostiquer la présence active du virus. Les anticorps n'apparaissent que 5 à 7 jours après l'infection. En mars, des municipalités, hôpitaux, services de santé et autres institutions ont émis des bons de commande pour 49.360 de ces tests rapides, pour un total de 588.000 dollars. Cependant, le ministère de la Santé a insisté pour ne pas les acquérir sans la validation de l'Institut de Santé Publique qui, jusqu'à présent, n'a émis aucune recommandation à ce sujet. Sans protocoles pour l'utilisation de ces examens, chaque entité décide comment les appliquer. Le ministre de la Santé a déclaré qu'il y avait cinq marques de test rapide validées au niveau international et que le gouvernement achetait un million de tests de ces marques pour effectuer des contrôles spécifiques, par exemple pour mettre fin à une quarantaine. Mais les tests achetés ou commandés en mars correspondent à 11 marques et donc 6 non certifiées. Des achats motivés par l'urgence (la peur?) qui pourraient bien être une dépense inutile! Le ministère de la Santé appliquera les tests certifiés aux gens qui ont eu la maladie pour certifier s'ils sont immunisés, auquel cas ils recevront une carte d'identité sanitaire qui les dispensera des mesures de restriction. (Mais l'OMS a émis des doutes sur cette immunité.)
- L'emploi de couvre-bouches est devenu obligatoire dans tous les moyens de transport non particuliers et recommandé pour les achats. Les particuliers doivent les fabriquer eux-même vu qu'il n'y en a pas dans le commerce. Le ministère de la Santé indique comment les faire sur son site web.
- Toutes les interventions chirurgicales non urgentes ont été remises à plus tard.
- Plusieurs communes ont annoncé un service gratuit de remise à domicile de médicaments pour les seniors (Aux plus de 80 ans il reste interdit de sortir.).
- Selon l'Organisation Panaméricaine de la Santé et les estimations du ministère de la Santé, la contagion atteindra son maximum ici fin avril ou en mai. Pour le moment, en est encore en phase d'accélération. Mais on pronostique encore une autre hausse en juin.
- On commence enfin a dire qu'il pourra y avoir des restrictions tout le reste de l'année.
- Le premier mois s'est terminé avec 3.737 cas, alors qu'on attendait jusque 50.000. Au 11/04, 1.255 personnes n'avaient pas respecté la quarantaine totale qui leur était imposée. A ce jour, il y a 82 morts et le nombre de contagiés est de 7.525. 36% des affectés ont entre 30 et 44 ans; 10% sont des seniors. Il y a 119 communes (de plus de 300), hors des grandes villes, sans aucun contagié.
Carte dynamique de la progression du virus:


Politique
- Le président Piñera a promulgué une loi qui assurera une rentrée minimum nette garantie de 300.000 CLP (320 €) à tous les travailleurs formels, l'État complétant la différence si leur salaire est seulement le minimum obligatoire (qui est un peu inférieur). Un apport pour les autres est à l'étude.
- 61,7% des chiliens sont critiques des actions du président Piñera face à la crise sanitaire. Son approbation est de 22 %.
- Statistique d'approbation/réprobation des institutions: le parlement et les partis de gauche au bas de la table: https://twitter.com/jtgazmuri/status/1247143934041698304/photo/1

Economie
- La crise sociale qui a commencé le 18 octobre avec des pillages et des incendies dans plusieurs magasins et supermarchés a fortement affecté les résultats 2019 des chaînes de grands magasins au Chili. Mais les baisses des ventes dans le commerce de détail se manifestent depuis 2 ans au niveau latino-américain et s'est traduit par une baisse constante des emplois. En effet, au cours des sept dernières années, les grands détaillants chiliens tels que Cencosud, Falabella, Ripley, SMU, Forus et La Polar ont réduit leurs emplois de 38.591 dans les différents pays dans lesquels ils opèrent. Le scénario est encore plus complexe avec le coronavirus, qui a obligé à fermer les grandes surfaces. Mais les ventes par internet ont doublé et les ventes des supermarchés ont augmenté de 52% (surtout de produits périssables) et on observe de longuies files à l'extérieur, car le nombre de clients à l'intérieur est limité, pour assurer la distance entre eux. On estime que 87% des petits commerces ne pourront survivre 3 mois sans ventes.
- Les ventes de boissons alcoholiques ont augmenté de 35%.
- Il y a eu de longues files pour toucher l'allocation de chômage, la plateforme d'internet ne fonctionnant pas.
- La Banque Centrale espère une récupération de l'économie au troisième trimestre.
- Les fonds de pension ont fait une perte de 11% en moyenne au premier trimestre.
- Le taux d'intérêt des crédits hypothécaire a augmenté de 2,64% (alors que le gouvernement demande aux banques de donner plus de facilités!)
- Les assureurs de santé privés ayant annoncé qu'ils augmenteraient leur prix à partir de juillet, le président Piñera leur a demandé d'annuler cette hausse mais elle a été finalement reporté à novembre, non annulée.
- Les utilités des banques ont baissé de 24% en comparaison à mars 2019.
- Le président Piñera a annoncé un projet de loi de "Fonds de garantie des petites entreprises": garantie de l'État pour des crédits d'un montant jusqu'à 3 mois de ventes normales (moyenne d'oct 2018-sept2019), avec 6 mois de grâce, une durée de remboursement de 24 à 48 mois et un taux préférentiel réel de 0% ou négatif. En outre, obligation hebdomadaire des banques de déclarer les placements.
- Les marchés ont été interdits à divers endroits, parce que les acheteurs ne respectaient pas les consignes d'hygiène (couvre-bouche, distance entre eux et gants). Des communes obligent aussi les marchands à passer l'argent dans des plats d'eau chlorée.
- Seulement 23% des chiliens croient que la situation économique du pays sera dans un an meilleure que maintenant; 32% ne s'y fient pas du tout. Ils sont les plus pessimistes de la région.

Religion
- Les liturgies de Semaine Sainte ont eu lieu sans présence de fidèles. Mais un pasteur protestant a enfreint la mesure et, contagié, a mis en danger une trentaine de ses fidèles. Un autre a invité ses fidèles, par télévision (un canal s'y est prêté!), à sortir prêcher et un autre a insisté à faire un culte public où ont assisté des gens de plusieurs communes (qui y ont voyagé en transport public), en contravention avec l'interdiction de réunions massives. Son temple a été clausuré et il devra être dénoncé en justice. Il a été repris publiquement par un de ses confrères: "Un bon pasteur protège ses brebis."

Sécurité
- Le couvre-feu n'a pas fait diminuer les attaques aux comissariats (l'un d'eux 67 fois depuis le 18 octobre!), les barricades dans des avenues ou les vols avec agression. Il y a eu 969 arrestations pour délits en période de couvre-feu.
- Un groupe armé, en tenue de camouflage, a attaqué une unité policière en Aracaunie et a fait exploser une auto-bombe à quelques mètres d'un pont en Araucanie. Des machines ont aussi été incendiées. (La violence n'a pas diminué dans cette région et la police est toujours inerme.)

Transports et Communications
- Selon une analyse de Google Maps, les déplacements aux alentours des résidences privées ont augmenté de 24%, diminuant de 45% autour des lieux de travail.
- Une nouvelle erreur de coordination et un mauvais fonctionnement des systèmes numériques (paiement par internet) a provoqué de grandes agglomérations de chauffeurs pour payer leur permis de circulation le dernier jour de mars dans les buraux destinés a cette fin (contrairement aux recommendations du ministère de la Santé). La date limite a finalement été reportée au 30 juin... par une loi approuvée dans la nuit du 31 mars et publiée au début du présent mois.
- Des "douannes sanitaires" ont été installées dans tous les terminaux de bus inter-provinciaux, pour détecter les possibles contagiés et les empêcher de voyager. Il y a eu un contrôle strict à partir du jeudi saint pour empêcher les déplacements de plaisir (interdiction de sortir de la Région Métropolitaine et autres villes). Il y a eu congestion sur les grand-routes et la police a refoulé 1.127 autos qui tentaient d'aller passer le week-end à la côte. Il semble que beaucoup ont réussi à se déplacer avant l'établissement des postes de contrôle car les résidents de la côte se sont plaints de leur arrivée; on y a même détecté des voyages en hélicoptères.
- Plus de 4.000 chiliens revenus de l'étranger ont donné une fausse adresse lors du contrôle d'entrée à l'aérioport, rendant ainsi impossible le contrôle de la quarantaine à laquelle ils étaient obligés.


EXTRA: Voilà ce qu'il faudra pour nous ramener dehors (Extraits)
(MIT Tech Review, 13/4/2020)
Tout pourrait être terminé plus rapidement si certains médicaments existants, déjà connus pour être sûrs pour d'autres utilisations, s'avèrent efficaces dans le traitement de covid-19. Mais il se peut que seul un vaccin donne le coup de grâce, et même dans ce cas, nous ne savons toujours pas combien de temps un vaccin restera efficace pendant que le virus mute. Nous devons nous préparer à un monde dans lequel il n'y a pas de remède ni de vaccin pendant longtemps. Il y a moyen de vivre dans ce monde sans rester définitivement enfermé à l'intérieur. Mais ce ne sera pas un retour à la normale.
Ces dernières semaines, un consensus a commencé à se dégager parmi divers groupes d'experts sur ce à quoi pourrait ressembler cette nouvelle normalité. Certaines parties de la stratégie refléteront les pratiques de recherche des contacts et de surveillance des maladies adoptées dans les pays qui ont le mieux combattu le virus jusqu'à présent, comme la Corée du Sud et Singapour.
Cela impliquera un degré considérable de surveillance et de contrôle social, bien qu'il existe des moyens de le rendre moins intrusif qu'il ne l'a été dans certains pays. Cela va également créer ou exacerber des divisions entre les nantis et les démunis, ceux qui ont du travail qui peut être fait à domicile et ceux qui n'en ont pas, ceux qui sont autorisés à se déplacer librement et ceux qui ne le sont pas, etc.
Ce nouvel ordre social semblera impensable à la plupart des gens dans les pays dits libres. Mais tout changement peut rapidement devenir normal si les gens l'acceptent. La véritable anomalie est à quel point les choses sont incertaines. La pandémie a sapé la prévisibilité d'une vie normale, le grand nombre de choses que nous supposons toujours pouvoir encore faire demain. C'est pourquoi tout se sent mal ancré, pourquoi l'économie s'effondre, pourquoi tout le monde est stressé: parce que nous ne pouvons plus prédire ce qui sera autorisé et ce qui ne le sera pas dans une semaine, un mois, ou trois, six ou 12 mois.
Revenir à la normale n'est donc pas tant retrouver l'ancienne normalité que retrouver la capacité de savoir ce qui va se passer demain. Ce que nous ne pouvons pas encore prédire, c'est combien de temps il faudra aux dirigeants politiques pour faire ce qu'il faut pour y arriver.