31/05/2021

Mai (b)

Santé (au 30/05)
- Contagiés actifs actuels: 40.000 confirmés. Après une forte baisse, en 2 semaines, ils ont de nouveau augmenté (61% de plus dans les communes à moitié déconfinées de Santiago, 22,8% de plus pour tout Santiago et 14,4% de plus pour le pays), revenant à plus de 8.000 par jour et 270.5 cas sur 100.000. De nombreuses communes retournent au confinement total mais les gens s'y résistent. De nouveaux postes de vaccination ont été ouverts le week-end en région métropolitaine pour absorber la grande demande (beaucoup de retardés).
- Taux de reproduction (R): 1.15 en Région Métropolitaine.
- Le traçage des contacts reste de l'ordre de 2,7 par contagié actif (ce qui est extrêmement insuffisant).
- Total des cas: 1,389 millions - Statistiques dynamiques 
- Patients en ventilation mécanique: 2.500 (Graphique évolutif). les hôpitaux sont pratiquement saturés.
- Décédés: plus de 29.000 (37.000 si on inclut les cas suspects).
- Vaccinés: 9,8 millions (7,8 millions avec les deux doses; objectif: 15,2 millions). Seulement 57% de ceux qui sont dans les 30 ans se sont vaccinés. De 416 personnes vaccinées avec Sinovac, seulement 1 s'est contagiée, et seulement 1 de 14.285 a dû être hospitalisée en soins intensifs.
- Ceux qui ont reçu les deux doses de vaccin ont droit, après 15 jours, à un "laissez-passer de mobilité" qui leur permet de circuler librement dans les zones en confinement (mais où les autorisations pour achats et autres leur resteront nécessaires). C'est "un prix pour le bon comportement, surtout des seniors" a dit le ministre de la Santé.Plus de 5 millions de personnes l'ont demandé. Cela a provoqué de longues files dans les centre de vaccination. On rappelle que le vaccin n'empêche pas la contagion et que le port du masque reste indispensable. Il n'y aura pas encore de "passeport vert". Les frontières restent fermées mais il y a grande affluence dans les gares de cars interrégionaux.
- Le collège des médecins trouve qu'il est trop tôt pour cette mesure, demande une meilleure écoute des épidémiologues et, finalement, a annoncé qu'il se retire de la commission qui conseille le gouvernement.
- A cause de la pandémie, 250.000 personnes attendent depuis un an d'être opérées dans le système public. Autant doivent y attendre 15 mois pour pouvoir voir un spécialiste.
- Une clinique privée a attaqué en justice son ex-gérent parce qu'il "a recu trop de patients Covid"!!
- Quelques cas de mucormicose ("champignon noir" fréquent en Inde) chez des patients de Covid ont déjè été constatés ici.
- Débit 2020, la Confédération de la Production et du Commerce a acheté en Chine 515 ventilateurs pulmonaires. Aujourd'hui, seulement 32 sont en opération; les autres ont dû être remplacés, étant "trop élémentaires", ou même n'ont jamais pu être utilisés, étant de mauvaise qualité ou même pas en condition de fonctionner. Des dizaines de millions de dollars perdus!

Politique et administration
- Le président Piñera a reconnu qu'il "ne syntonisait pas avec les demandes des gens". Il a demandé à ses ministres "une relation plus proche avec les citoyens" et plus de présence "sur le terrain, pour mieux se connecter aux nécessités des gens".
- Inscription pour les primaires présidentielles: C'est quand se forment les pactes en vue de l'élection présidentielle, chaque parti présentant son candidat. En juillet, les électeurs choisiront lequel sera le candidat présidentiel de chaque coalition. Deux groupes se sont finalement inscrits: 1. Chile Vamos (droite) avec les candidats Lavin (UDI), Desbordes (RN), Briones (Evopoli) et Sichel (indép.); 2. FA-PC: Boric (Front Ample) et Jadue (PC). Ce dernier groupe a refusé, en dernière minute, de s'allier avec les anciens partis de centre-gauche ("Concertation") comme au temps de Bachelet. Ces deux alliances auront droit à de la ppropagande en télévision payée par l'état.
De cette facon, le centre-gauche n'a pu participer aux élections primaires mais pourra encore chercher des accords entr'eux pour présenter l'un ou l'auttre candidat en novembre (sans primaires officielles). Les candidats de droite feront tout leur possible pour se distancier du président Piñera.
- La "Liste du Peuple" (les soulevés d'octobre 2019), qui a eu un excellent résultat pour la Convention Constituante, prétend présenter des candidats pour les élections parlementaires et peut-être même la présidentielle de novembre.
- Le bourguemestre et candidat communiste à la présidence a demandé au gouvernement de libérer "tous les prisonniers de la révolte" de 2019. Un projet est en discussion au parlement. (Il y a en prison préventive une douzaine d'imputés pour saccages, lancement de cocktails molotov et agressions â la police.)
- Préférence actuelle pour un futur président: Lavin 14,8%, Jadue 13,3%, Jiles, 10,2%. (Il y a quelques autres, avec moins de 10%).
- 4 députés ont été sanctionnés par la commission d'éthique de la chambre pour avoir assisté }a des programmes de conversation en télévision en horaire de travail.

Economie
- La bourse locale a subi une baisse de 10% le lendemain des élections mais a récupéré quelque peu.
- Alors que le Chili est le 4e pays le plus inégal et que le 1% le plus riches a des rentrées supérieures au 1% de Norvège et Allemagne, les députés de droite s'opposent à un impôt pour ces plus riches. [Ils n'ont toujours rien compris, malgré la débâcle des élections?]
- Le président Piñera a annoncé de nouveau projets de lois qui donneraient de nouveaux bénéfices à 7 millions de familles et aux PME pendant 3 mois, ce qui aurait un coût de 11.700 millions de dollars. La présidente du sénat a répondu que cela "n'était rien" et que le président ne comprend toujours pas les nécessités des gens. L'opposition demande des bénéfices qui auraient un coût de 17.000 millions de dollars.
- Depuis janvier, les 2 fonds de pensions "à risque" ont gagné entre 5 et 8% d'intérêts, alors que les 2 "plus stables" ont perdu entre 4 et 6%.
- La vente d'appareils électrodomestiques a fortement augmenté cette année, produit -sans aucun doute- des retraits des fonds de pensions.

Sécurité et justice
- Araucanie: Nouvelles attaques et incendies. Un carabinier a été assassiné par des coups de feu lorsque son véhicule passait sur une route de la région.
- Ayant obtenu l'accord préalable de la veuve, le président Piñera et sa femme se sont déplacés pour assister à la messe de funérailles de ce carabinier. mais une fois dans l'église, le père et le frère du défunt leur ont demandé rudement de quitter le temple.
- 557 kg de drogue cachées dans du chocolat ont été saisies. Un nouveau laboratoire clandestin a aussi été découvert.
- Nouveau scandale chez les carabiniers: des généraux, commandants et capitaines recevaient des pots-de-vin millionaires pour faire retirer des véhicules en infraction par une entreprise de grues et les mener à un parking privé opérés par des narcotrafiquants, qui leur servait aussi pour blanchir des devises.

Education
- Une évaluation récente montre que les élèves de moyenne n'atteignent pas les 60% du minimum requis en compréhension de lecture.

Science et environnement
- Près de 6.000 tonnes de saumons sont morts à cause d'une marée d'algues nocives dans la Région des Lacs et celle d'Aysén. 60 organisations écologiques demandent le départ de l'industrie des saumons.
- A partir de novembre, il sera interdit de donner des pailles, des couverts en plastic et des gobelets en écume lors de la vente d'aliments.

Extras:
La vision indigène 
Partis politiques: déroute et défis 
Spécial Elections de mai 
Nouvelles antérieures 

La vision indigène

Veronica Figueroa, Université du Chili (Ciperchile, 20/05/2021) (Synthèse)

Si nous remontons à une longue histoire, ce sont des siècles de résistance et de lutte, tant dans les territoires ancestraux que dans les zones urbaines, vers lesquels nous avons dû migrer forcés par des politiques étatiques qui cherchaient notre incorporation forcée dans leur projet de nation homogène. Une stratégie efficace, sans aucun doute, était la dépossession territoriale et l'obligation de rejoindre leurs établissements d'enseignement, leurs systèmes de santé, leurs conceptions de la citoyenneté et les règles du jeu définies par les élites. Cependant, malgré toutes ces actions, nous sommes là. C'est cette résistance qui a trouvé écho, empathie et soutien chez une majorité de citoyens qui ont compris la nature de cette lutte.
Si nous revenons à une histoire courte, l'incorporation des peuples autochtones dans le processus constitutif s'est produite dans un contexte de profond changement social, d'inégalités évidentes et d'exclusions historiques, qui a eu son moment de concrétion dans la loi 21.298 qui a modifié la Charte fondamentale pour réserver des sièges pour représentants des peuples autochtones dans la Convention Constitutionnelle. Dix-sept sièges qui n'ont pas été sans longs et complexes débats au Congrès.
De fait, il est pertinent de souligner que la méfiance envers le cadre institutionnel de l'État a constitué la base pour différents secteurs et mouvements de peuples autochtones, principalement mapouche, pour appeler à ne pas participer à ce processus parce qu'ils le considéraient comme colonialiste et une stratégie de plus pour minimiser les droits légitimes de ces peuples. De cette manière, des organisations telles que le Conseil de Toutes les Terres, la Coordination Arauco-Malleco, entre autres, ont exprimé leurs doutes légitimes devant cette instance.
Ces antécédents sont essentiels pour comprendre la dynamique du processus électoral que nous avons vécu en cette journée historique des 15 et 16 mai. Au total, le registre des électeurs autochtones dans tout le pays était de 1.239.295 personnes, où le peuple Mapouche a concentré 1.063.980 électeurs, suivi du peuple Aymara avec 75.743 électeurs, Diaguite avec 53.887, Likan Antay ou Atacamiens avec 22.569, Colla avec 9.183, Quechua avec 7.661, Rapa Nui avec 3.623, Chango avec 1.951, Kawashkar avec 528 et enfin le peuple Yagán avec 170 électeurs. De ce registre, environ 23% ont choisi de voter.
Pour la première fois dans l'histoire de la relation des peuples autochtones avec l'État chilien, nous avons pu participer à des élections de cette nature. Ceci étant la première expérience, l'ignorance, la méfiance, la méconnaissance de sa pertinence ou de sa signification peuvent être des facteurs explicatifs. On peut également citer l'appel lancé par divers mouvements à se soustraire au processus électoral. Dans une perspective plus restreinte, sans doute la pandémie, l'éloignement de certains territoires pour accéder aux bureaux de vote et le manque de moyens de transport, entre autres, peuvent avoir affecté le faible taux de vote. Le manque d'informations et de formation efficaces pour les différents acteurs impliqués dans ce processus (comme les chargés des tables de votation) a également eu un impact.
Dans différents cas [avant], il a été montré à quel point il est complexe de spécifier différents droits qui concernent ces peuples et qui ne sont pas cohérents avec ce qui est établi dans la Convention 169 de l'OIT [qui signale les obligations des gouvernements face à ces peuples], comme l'ont montré différentes expériences dans le cas chilien. À cette analyse, il faut ajouter que la préparation même du registre spécial pour les peuples autochtones avait déjà été identifiée comme une atteinte aux droits et que les problèmes qu'elle pouvait impliquer avaient été anticipés.
Une chose est claire: la Convention Constituante est plurinationale et interculturelle, exprimée en 17 mandants constituants qui ont courageusement assumé le défi de franchir la barrière que les institutions de l'État ont historiquement définie, et ont osé contester un espace de pouvoir clé pour faire avancer les droits des peuples autochtones. Bien que notre législation ne nous ait pas reconnus en tant que peuples et qu'aucune Constitution ne rende compte de notre existence en tant que telle, il y a de l'espoir que cela changera avec la nouvelle Constitution. La revue des programmes de candidatures sur le site du SERVEL, ainsi que les déclarations et interventions lors de leurs campagnes, démontrent leur engagement en faveur d'un État plurinational et de progresser vers l'autonomie fonctionnelle et territoriale.
Les règlements [de la Convention] doivent intégrer le droit et le processus de consultation préalable et éclairée des peuples autochtones concernant le projet constitutionnel, avant le plébiscite final de ratification, en tenant compte de ce qui est établi à l'article 6 de la Convention 169 de l'OIT. Cette consultation doit se faire dans le respect des normes internationales. Cette responsabilité n'appartient pas aux peuples autochtones mais à l'ensemble de la Convention, qui représente désormais les intérêts divers de ceux d'entre nous qui habitons et avons habité cette terre de manière ancestrale, avant même l'existence de l'État du Chili.
Cela ouvre un chemin d'espoirs, d'alternatives, de rêves et de défis. Parmi elles, positionner les propositions que les peuples autochtones cherchent à installer dans la nouvelle Constitution autour d'un État plurinational où le Chili soit reconnu comme étant composé de nations différentes. De même, progrès vers la reconnaissance dans la Constitution du droit des peuples autochtones à l'autodétermination et à l'autonomie. Le droit d'autodétermination est fondamental pour les peuples autochtones car il leur permet de visualiser leur propre avenir, d'établir leurs propres objectifs et de prendre les décisions nécessaires qui leur permettent de transformer ces visions et objectifs en réalités.

Partis politiques: déroute et défis


Alejandra Krauss, avocate (La Tercera, 28/05/2021) (Synthèse)

Si nous convenons que le but des partis est d'être des instruments qui représentent les personnes dans la tâche de réaliser le bien commun, et certainement au service des idéaux, répondant aux défis de chaque époque, ouverts aux organisations communautaires, sociales, territoriales, syndicales et des travailleurs, il est paradoxal de voir à quel point ils se sont éloignés progressivement [ici] de ces fins. Il semblerait qu'ils soient devenus une fin en eux-mêmes et ne soient plus un moyen de faire valoir les principes et les convictions auxquels ils prétendent adhérer et, ce qui est plus grave, ont cessé de représenter ceux qui en ont le plus besoin.
Lors des dernières élections, les citoyens ont réagi de manière claire et éloquente. Les résultats pour les partis, en particulier ceux qui gravitent depuis 80 ans, sont désastreux. Les partis qui gouvernent le pays depuis 35 ans représentent moins de la moitié des constituants élus. C'est un énorme changement.
Les élections des 15 et 16 mai ont montré quelque chose de remarquable, l'amour pour le Chili de milliers de chiliens qui étaient prêts à tout abandonner pour être des constituants et représenter leurs voisins, amis et adhérents. Nous devons recueillir ce désir et le canaliser. Il n'y a pas de démocratie qui fonctionne sans partis, et les citoyens nous disent clairement que celle que nous avons ne fonctionne pas pour eux.
L'individualisme et la dépolitisation qui accompagnent depuis de nombreuses années notre société est l'une des raisons de cette défaite. C'est pourquoi le rôle que jouent les indépendants aux côtés des institutions politiques sera essentiel. Nous ne devons pas permettre que le rêve individualiste d’une partie de la société se réalise ou que notre société en soit vaincue.
La solution n'est pas d'éliminer les partis mais de les améliorer et de permettre à beaucoup d'autres de surgir. Pour ce faire, ils doivent être capables de lire et d'écouter très bien le message des citoyens. Il faudra assumer les responsabilités qui correspondent en tant qu'acteurs politiques, aussi douloureux que cela puisse être. Et un signal clair et public de changement doit être donné.

21/05/2021

Spécial Elections de mai

Élections des 15 et 16 mai
Participation: seulement 43,35% des électeurs ont voté (6 millions de votants), mais seulement 22% des indigènes. On pense que la plupart de ceux qui ont élu Piñera en 2017 n'ont pas été voter.
En bref: grande défaite pour tous les partis qui ont gouverné depuis le retour à la démocratie (1990), surtout pour la droite (et le gouvernement), et pour le populisme (députée Jiles et cie); victoire pour les indépendants et les nouveaux partis de gauche. 77 constituants (de 155) sont de listes qui promeuvent des changements radicaux. La bourse locale en est tombée de 10%.
Gouverneurs: seulement 3 des 16 sont élus; il y aura ballotage pour les autres. Aucun espoir pour la droite en Région Métropolitaine: sa candidate a été 4e.
Bourguemestres (346): Chili Vamos (droite): 88; Unité pour l'Approbation (gauche traditionnelle): 68; Unité pour la Dignité (DC et Pro): 60; Front Ample: 12; Chili Digne et Souverain (PC et autres petits partis): 9. Le PC a gagné la commune de Santiago et le Front Ample à Valparaiso et sa voisine Viña-del-Mar.
Membres de la convention constituante
- Indépendants (31%) = Liste du Peuple (de ceux qui protestaient fin 1990, anti-systémiques et intolérants): 24; + Pour la nouvelle Constitution (sans compromis politique): 11; + autres: 30.
- Allons pour le Chili (droite): 37 (23,9%).
- Approuve Dignité (Front Ample + PC): 28 dont 7 PC (18,1%).
- Liste de l'Approbation (gauche traditionnelle et DC): 25 (15 PS, 2 DC) (16,1%)
Aucun groupe n'a le tiers des voix qui permettrait de bloquer un article, mais il pourrait se former une majorité des 2/3, de tendance de gauche, pour en imposer, et 77 proposent des changements radicaux. Il y a eu plus de femmes élues que d'hommes, et plusieurs ont dû céder leur place à des hommes selon la règle de parité établie.

Ce que pensent les membres de la Convention Constituante
Enquête du journal La Tercera (18/05)

De 122 constituants consultés (des 155 élus): 59 sont avocats; 19 sont professeurs; 46,8% défendent un système semi-présidentiel; 51% préfèrent un système parlementaire avec une seule chambre; 30,7% avec les 2. 32,5% désirent éliminer le contrôle des lois par le Tribunal Constitutionnel quand le parlement les discute et 31,7% veulent éliminer ce tribunal. 45,8% veulent maintenir les quorums supramajoritaires au parlement pour certaines matières et 40,8% veulent les éliminer. 87% appuyent l'autonomie de la Banque Centrale mais 49,6% veulent en changer le fonctionnement. 91,6% veulent que la constitution inclue l'accès, la protection et la distribution de l'eau comme droit fondamental. 69,2% croient que l'Etat doit garantir la propriété d'un logis digne. 41,7% demandent que soit consacré un modèle de matrice énergétique qui garantisse l'accès égalitaire à des sources renouvelables et propres. 70% demandent la reconnaissance des peuples originaires et de la diversité culturelle, et du pays comme "Etat plurinational". 57,9% veulent maintenir un état unitaire mais avec plus d'attributions aux autorités régionales alors que 41,3% pensent à un état fédéral.

Le Chili est autre
Eduardo Arriagada, ex-doyen Faculté de Communications, U.Catholique de Santiago
(Synthèse) (El País Digital, Argentine, 18/05) 
 
Toutes les analyses s'attendaient à ce que cette élection soit le début de la fin du parti des leaders étudiants de 2011, peut-être confus par la crise du parti frère espagnol, "Podemos". Aujourd'hui, sa lettre présidentielle Gabriel Boric pourrait devenir la meilleure option pour le «centre gauche». Le sorpasso à l'intérieur de la gauche était en leur faveur.
Le Parti Communiste (PC) a réussi à dissiper la peur endémique de ses électeurs et à sortir de la marginalité électorale grâce à la proéminence que ses dirigeants ont prise depuis la flambée sociale de 2019. Les analystes ont recommandé d'évaluer leurs résultats en examinant le renouvellement de leurs maires actuels et les nouveaux municipes qu'ils ont acquis. Ils ont même gagné [la commune] de Santiago. Pour les médias, le PC avait la particularité d'avoir le plus grand nombre de membres mais peu de possibilités. Une analyse fine pour nuancer leur succès: cela aurait été réalisé si, lors de l'élection constituante, ils surpassaient leurs partenaires du Front Ample, qui les double aujourd'hui en sièges au Congrès, mais cela ne s'est pas produit. Le Front les duplique également dans la constituante.
Mais la grande erreur de tous a été de ne pas voir le phénomène de la Liste du Peuple, le plus grand succès des indépendants qui a été à peine évoqué pendant la campagne.
Les grands perdants sont les partis qui étaient au gouvernement et les fiers dominateurs de la politique chilienne au cours de ces 30 dernières années. Bien sûr, le pire est survenu aux partis de droite qui, bien qu’ils aient réussi à tenir une longue liste, restèrent loin d’atteindre les 30% avec lesquels ils espéraient contrôler les «excès» constitutionnels de la gauche. Mais l'ancienne "Concertation" [coalition de centre-gauche], désormais «Unité Constituante», a aussi presque disparu.
La politique "pop" de la télévision a également été vaincue. Les sondages pariaient depuis mars sur la consolidation d'un phénomène populiste né dans la télévision du show business. La clé serait montrée par le résultat de Pablo Maltés, dit "le grand-père". On s'attendait à ce qu'il soit troisième ou deuxième dans la course au poste de gouverneur de la Région Métropolitaine, mais il a terminé cinquième, malgré les abus de sa partenaire médiatique "grand-mère" Pamela Jiles.
Le Chili en est autre. Il y a des signes qui donnent de l'espoir: la tranquillité au fur et à mesure que cela se développe; la capacité du système de santé qui a su faire face à la pandémie et le travail exemplaire du service électoral qui, en quatre heures, a réussi à donner les résultats généraux de 4 élections avec près de 5.000 candidats, continue de laisser tous les secteurs en paix. 
 

14/05/2021

Mai (a)

Santé (au 14/05)
- Contagiés actifs actuels: 37.810 (9% de moins en un mois, -12% la dernière quinzaine, mais +1.8% la dernière semaine). Le Groupe Épidémiologique de l'Université de Santiago estime qu'il y a 41% de cas de plus (non reportés). 61% des nouveaux infectés ont moins de 40 ans.
- Taux de reproduction (R): 0.98 pour le pays mais plus haut dans 2 régions (dont la métropolitaine).
- Total des cas: 1.256.546 - Statistiques dynamiques
- Patients en ventilation mécanique: plus de 2.800 (Graphique évolutif). Les hospitalisations ont baissé de 90% depuis le maximum de mi-avril. Le nombre de lits de soins intensifs a été augmenté de 320% depuis fin 2019 pour faire face à la nouvelle nécessité (75% du total furent requis pour COVID-19).
- Décédés: plus de 27.300. Avril a été le mois avec le plus de décès.
- Vaccinés: 9 millions (7,4 millions avec les deux doses; objectif: 15,2 millions). Tous les plus de 35 ans ont déjà été convoqués. Graphique historique de comparaison par pays
- Environ 90 communes -dont la commune de Santiago (centre de la ville)- ont pu sortir du confinement total (passant à partiel) cette quinzaine.
- Depuis le début de la pandémie, 26.000 amendes pour infractions des mesures sanitaires dont été appliquées dans la région métropolitaine.
- L'Institut de Santé Publique a écarté l'existence d'une mutation chilienne du virus, mais Israel dit qu'ils l'y ont détectée.
- 46,7% des chiliens souffriraient de symptômes de dépression.
- "Vivre dans le secteur oriental de Santiago versus les communes plus pauvres signifie un trajet qui se termine par une probabilité inférieure de mourir de Covid pour les premières. Le niveau socio-économique a un impact important." L'accès à la santé y est plus difficile (services saturés), le niveau éducatif moindre, le sédentarisme et l'obésité plus fréquents. "La stratégie iniciale d'atténuer la contagion a été un erreur. il fallait la suprimer [par des mesures plus drastiques], comme dans les pays qui ont eu du succès." (Etude CIPER-Chile, en anglais ici)
- Le "passeport vert" est à l'étude mais les experts considèrent que la quantité actuelle de contagiés est encore trop haute pour qu'il soit lancé peu après les élections de mi-mai.
- Les travailleurs de la santé ont subi l'an passé 1.310 agressions de patients ou membres de leur famille (à cause de l'attente ou du décès).

Politique et administration
- La Commission Chilienne de Droits Humains, avec l'ex-juge espagnol Balthasar Garzon (qui avait fait arrêter Pinochet), a accusé le président Piñera de crimes de lèse-humanité devant le Tribunal International de Justice de la Haye (pour sa responsabilité durant les manifestations réprimées d'octobre 2019).
- La parti communiste (PC) voulait faire alliance avec le parti socialiste (ce qui a mené au désastre de 1973) et son candidat présidentiel s'est déclaré "héritier d'Allende", ce qui rendu furieux le parti socialiste (à qui Allende appartenait), lequel a assuré qu'il ne s'allierait qu'avec des partisans de la social-démocratie.
- Problème pour les éventuels accords gouvernement-opposition: le PC et le Front Ample considèrent une erreur "permettre au gouvernement de respirer" et la droite préfèrerait que le gouvernement commence par "ordonner sa propre maison".
- 70% de la population estime que l'on vit une sérieuse crise politique.
- Le président a promulgué la loi qui permet de choisir l'ordre des noms de famille au Registre Civil. (Jusqu'à présent il fallait le nom de famille du père suivi de celui de la mère; maintenant l'ordre est à volonté de qui fait l'inscription.)
- Il a aussi promulgué une loi de "protection de la santé mentale". 27% des chiliens souffrent de problèmes mentaux et la loi précise leurs droits, dont l'aide psychologique par internet.
- 15 et 16 mai: élections de gouverneurs (16), bourguemestres (346), échevins pour les mêmes communes, et membres de l'assemblée constituante (155, dont 45% au moins doivent être des femmes). Seulement dans ce dernier cas il y a de nombreux vrais indépendants (il y a aussi des "indépendants" qui se sont joints à des listes de partis). Il y a, pour cette assemblée, 1.300 candidats, répartis en 70 listes et 28 districts. 80% voteraient pour des candidats indépendants mais, vu leur dispersion, les candidats de partis pourraient concentrer plus de votes malgré que les partis n'ont que 2% de confiance. Mais un tiers des electeurs disent ne pas savoir pour qui ni pourquoi voter!
La gauche espère obtenir de nombreux gouverneurs, mais personne ne se risque à faires d'autres prédictions (et la droite tremble de peur).
Tous les commerces doivent fermer ces 2 jours, sauf ceux que servent leur propriétaire.
- Entre le 1er mars et le 2 mai, il y a eu 132 programmes de télévision, avec 287 invités, dans 5 canaux, pour aborder les élections de mai. L'auteur de l'étude a détecté des réalisations importantes telles que l'équilibre entre les invités masculins et féminins. Mais, dans la somme totale, Evópoli (parti libéral, de centre-droite) a été surreprésenté; les candidats indigènes ont été marginalisés (2%); les districts où se trouvent les communes les plus riches ont reçu une attention excessive, seulement 36,4% de candidats étaient de province. 30% des invités étaient de droite, 23% de centre-gauche, 21% de gauche et 23,5% indépendants.

Economie
- Le gouvernement a annoncé un nouveau fond de 1.000 millions de dollars pour aider les PME et des subsides pour engager de la main d'oeuvre mais 75% des entreprises n'y pensent pas.
- 4,7 millions de foyers ont pu recevoir en avril un bonus économique du gouvernement.
- Les principales banques n'informent plus (depuis assez longtemps) du taux d'intérêt de leurs comptes d'épargne (généralement, de moins d'1% annuel, semble-t'il) et certaines n'acceptent même plus d'en ouvrir. Les dépots à terme (avec intérêts) n'apparaissent plus non plus sur leurs webs.
- 2,8 millions de personnes ont demandé le 3e retrait de 10% des fonds de pension le premier jour où la demande était possible et environ 1 million de plus dans les jours suivants; 3,5 millions de ceux ont moins de 200.000 CLP (+-220€) sur leur compte de pension ont demandé les 200.000 CLP que la loi a assuré pour eux; ce qui leur manque pour arriver à ce montant étant payé par l'Etat.
. Les 3 retraits de 10% ont signifié la liquidation de près de 44.000 millions de dollars.
- La loi a aussi autorisé, pour les pensionnés avec rente viajère, le retrait de 10% de la réserve technique de la compagnie d'assurance qui la leur paye (avec un max. de 4,4 millions de CLP). Il y a 161.000 demandes de retrait dans ce cas. Cela cause un conflit avec ces compagnies car cela affecterait leur patrimoine. Mais, selon les juristes locaux, ces compagnies ne pourraient demander une indemnisation, car il s'agit au fond de répartir d'une autre façon les fonds prévus pour chaque bénéficaire. Un recours devant un tribunal international pour violation de la protection des investissements est factible pour les assurances de base étrangère (et plusieurs ont déjà réclamé), mais est vue comme complexe.
Effets des retraits: l'endettement moyen des chiliens a baissé, l'économie a été un peu réactivée (par les achats) et la rentabilité des fonds de pension a baissé chaque fois.
- Les aliments coûtent ici 33% de plus qu'aux USA, 39% de plus qu'en Grande Bretagne, 29% de plus qu'en Espagne, 11% de plus qu'en Allemagne, et sont ce qui a le plus augmenté dans les derniers mois. Et le salaire minimum garanti n'est que la moitié ou un tiers (840.000 travailleurs le reçoivent). Le prix des matériaux de construction a augmenté de 50 à 100% depuis le début de la pandémie.
- Le prix du cuivre a atteint son niveau le plus haut de son histoire, faisant baisser la valeur locale du dollar.
- Le travail informel a atteint 27,6% au premier trimestre.
- La perception des chiliens d'être de classe moyenne a baissé de 43 à 30% en 2 ans.
- Des journalistes ont découvert qu'une seule entreprise est parvenue à contrôler l'installation et la réparation de près de 80% des sémaphores du pays en "conseillant" les règles à appliquer lors des licitations, qui la bénéficient (et obtenant de gros bénéfices grâce à des prix surfaits). On ne parle pas encore de procès...
- Des 2,4 millions d'emplois perdus à cause de la pandémie, 1,1 million auraient été récupérés selon une enquête de l'Université Catholique.
- Proposition de "rente universelle de base" de la gauche: une moyenne de 604.000 CLP (700 €) par foyer de 4 personnes, pour 4 mois (proportionnel selon le nombre de membres), qui couvrerait 80% des chiliens. Cela coûterait 17.600 millions de dollars, un quart d'un budget national annuel. Le gouvernement trouve cela excessif et veut le limiter aux foyers inscrits au "registre social" (foyers qui ont droit à divers types de subsides), dont seulement 60% puis 80% (13 millions de personnes) avaient déjà reçu une "rente d'urgence" de 100.000 CLP (115€) pendant plusieurs mois, montant qui serait augmenté. [Ce registre existe depuis des années et a des conditions d'entrée fixes.] Ce sera discuté la semaine prochaine sur la base de projets de lois envoyés au parlement.
- Une enquête journalistique a découvert que, dans la région métropolitaine, il y a 2.680 "super-´propriétaires", qui possèdent en moyenne 8 logis (l'un en a 96!), presque tous appartements "économiques" (avec exemption tributaire). Ils assurent ainsi leurs rentes (grâce aux loyers) mais contribuent au déficit de logis disponibles pour achat avec hypothèque et à l'augmentation des prix tant de la construction comme des loyers. Vu qu'il y a un subside pour locataires, pour ceux qui n'arrivent pas à acheter, ce sont ces propriétaires qui en profitent le plus.
- Les faillites d'entreprises ont augmenté de 13,5% en avril et de plus de 10% en mars.

Sécurité et justice
- Araucanie: Nouvelles attaques à coups de feu à des commisssariats et même à un blindé de la police, avec armes de guerre et balles qui ont traversé le blindage. Multiples incendies de maisons, hangars, camions et machines agricoles, entr'autres de mapouches qui travaillent avec des entreprises non mapouches, traités de "traîtres"; et aussi d'une école, pour la deuxième fois en un an (à peine reconstruite). Il y a carabiniers et civils blessés mais pas de nouvelles arrestations. Des juges de la zone refusent d'autoriser des expertises demandées par les procureurs chargés des enquêtes! [Peur?]. Les panflets trouvés sur les lieux exigent la libération des détenus locaux accusés d'assassinats, trafic de drogue et d'armes.
- Trafic de drogue: Des connections avec le cartel de Sinaloa (Mexique) ont été découvertes, alos que le trafic de cannabis "creepy" est lié au trafic colombien, qui a tenté d'installer une base à Iquique (nord). Le cartel de Sinaloa voulait utiliser les ports chiliens pour envoyer de la cocaïne en Europe. Il y a aussi du blanchiment de devises au moyen de cryptomonnaies. Le crime organisé est ce qui a le plus augmenté pendant la pandémie. (Voir item de Sécurité la quinzaine passée.)

Extras:
Le Chili au bord du précipice  

Le Chili au bord du précipice

1. Le gouvernement de Piñera est devenu intranscendant (Extraits)
(Deutsche Welle, 10/0i/2021)

Quels scénarios s'ouvrent, dans ce contexte défavorable, pour Piñera et son équipe?
Pour l'analyste Kenneth Bunker, le gouvernement est depuis longtemps devenu un gouvernement administratif. Après les élections du 15 mai, l'attention politique va se concentrer sur la Convention constitutionnelle, qui commencera à fonctionner en juin, et les futures élections présidentielles, qui auront lieu en novembre. Dans ce calendrier, le gouvernement trouvera à peine une place: il ne va pas passer au second plan, mais au troisème plan.
Piñera a eu l'occasion de travailler sur la proposition constitutionnelle de (l'ancienne présidente Michelle) Bachelet, et l'a ignorée. Il eut de nombreuses occasions d'éviter l'explosion sociale, car les signaux étaient là, et le gouvernement ne l'a jamais fait. Et lorsque l'explosion sociale est survenue, le gouvernement était hors jeu. Ce gouvernement arrive en retard, mal, et parfois n'arrive pas du tout, et les gens s'en rendent compte. Il a perdu beaucoup de pouvoir et a donc besoin de quelqu'un pour l'aider à comprendre les processus sociaux en cours. Dans ce qui reste, le gouvernement ne pourra promouvoir aucune de ses initiatives, car il n'a pas le soutien du Congrès ni du peuple.
Pour l'historienne et analyste Josefina Araos, l'essentiel est d'assurer un minimum de gouvernance et pour cela il est essentiel de se concentrer sur la consolidation de l'accord qui a été généré avec la présidente du Sénat, Yasna Provoste. C'est ce qui permettra de compenser la faiblesse du gouvernement et de briser [peut-être!] la dynamique d'obstruction entre le Congrès et l'exécutif. L'alternative pour Piñera est de se consacrer à la consolidation du processus de vaccination, son principal succès après le début de la pandémie, et à apporter une aide efficace aux personnes. Il est resté seul et sans autre marge d'action, ayant même perdu le soutien des membres des partis au pouvoir.

2. Au bord du précipice
Sergio Hirane, ingénieur commercial (TV La Red, 2/05/2021)

On dit que le Chili est au bord du précipice. Qui donnera le dernier coup d'épaule[pour qu'il tombe]? Ce sera le président Piñera avec son intervention politique? Ce sera Pamela Jiles avec sa farandole populiste? Ce sera Jadhue (communiste), avec sa formule vieille et échouée? Ce seront les politiciens de droite contagiés par le virus du populisme? Ce sera le tribunal constitutionnel avec son abandon évident de ses fonctions? Ce sera le parlement avec son coup d'état mou? Ce seront les syndicats idéologisés? Ce sera la presse qui crée des réalités selon son bon plaisir? La situation que nous vivons est si critique et fragile que n'importe qui peut donner le coup de grâce à notre pays.
Mes sentiments sont de peine et de rage. Peine, parce que avons été le pays avec le plus de succès de l'Amérique Latine et un référent pour toutes les universités du monde en matière économique. Quelques données irréfutables. Vous vous souvenez quand nous avions 500% d'inflation? Aujourd'hui nous avons environ 3% par an. Rentrées per capita de 1.600 dollars en 1973, à 23.000 dollars [en 2019]. Quelques uns diront "Bien, mais cela n'arrive pas aux plus pauvres." Un autre mensogne du populisme! La pauvreté s'est réduite de 45% à 8%. Maintenant, elle recommence à augmenter. L'espérance de vie, qui est très importante comme indicateur, était de 71 ans [il y a 40 ans] mais aujourd'hui près de 81 ans, la plus haute du monde! Avant le 2000, n'entraient à l'université qu'environ 140.000 personnes; aujourd'hui, cela a augmenté à 1.400.000, et 70% sont la première génération de leur famille. S'il vous manque encore des données, en 1980, 20% des chiliens avaient accès à des biens durables comme les frigos, les téléviseurs, etc.; aujoudh'hui ce sont près de 98%. Dans le cas des autos, seulement 18% en avaient; aujourd'hui, ce sont 50%.
Ces données et beaucoup d'autres, comme l'accès à l'éducation supérieure, aux logements, à la santé, etc., forment ce que dans le monde on a appelé le "miracle économique chilien". Malgré ces données empiriques, quelques uns continuent à dire que le problème est l'inégalité. Une autre afirmation fallacieuse. S'il est bien certains que certains pays de régime socialiste sont "plus égaux", cette égalité se fait dans la misère. Alors, qui devons-nous croire? Ceux qui se basent sur les données ou ceux qui se basent sur les histoires? Les données ne peuvent être démenties; les histoires peuvent se construire sur la base de mensonges. Une étude de l'OCDE, a montré que le Chili a eu la plus grande mobilité sociale des pays de ce groupe et l'indice de développement humain le plus haut d'Amérique Latine. Ce qui précède me donne beaucoup de peine, et me fait rager le fait que l'élite politique du pays se sent avec le droit d'hypothéquer l'avenir de millions de compatriotes avec des tricheries, des mensonges, du populisme débordant déguisé de justice sociale, la majorité d'eux motivée par leurs intérêts personnels. Je demande pardon aux bons leaders politiques qu'il y a mais, malheureusement, ils se mimétisent et se diluent dans la pire classe politique de notre histoire. Seulement pour démontrer le niveau de politiciens que nous avons, je vais terminer cet éditorial en montrant un message sur Twitter de la députée Pamela Jiles, de la dernière semaine, qui a "mis la musique" à laquelle dansent bien des politiciens: "Non, Yasna Provoste [présidente du sénat]! Que fais-tu au palais présidentiel avec un assassin accusé de crimes de lèse-humanité [le président Piñera!]? Sors de là, alors que nous pataugeons dans la boue! Sors de là! Au dehors du palais, les gens sont réprimés [ce qui est faux].". Que peut-on faire avec ce type de leader?
Note: Au moment de ce message de Jiles, la présidente du sénat et le président de la chambre étaient réunis avec le président Piñera et quelques ministres pour explorer les mesures sur lesquelles le gouvernement et l'opposition pourraient se mettre d'accord dans les prochaines semaines.

Carte d'influence politique de candidats présidenciels

(Synthèse)
Par Claudio Villegas, chercheur du Social Listening Lab, Université Catholique (El Mostrador, 29 mars 2021)

L'analyse se base sur la présence et les interactions, en avril, sur les médias sociaux, principalement Twitter, lesquels, à cause de la pandémie, sont la principale voie pour faire campagne**.
José Antonio Kast (extrême droite); 17% d'approbation publique
Il a un bon indice d'impact, mais restreint à une tranchée surreprésentée dans ces médias, une communauté de niche et très organisée, et ses messages n'arrivent à personne d'autre. Cette communauté a tendance à diffuser et à consommer du contenu conspirateur ou carrément extravagant, avec des opposés à l'ONU, diffuseurs de théories du complot comme la planification virale, les anti-vaccins et les terraplanistes.
Daniel Jadue (communiste); 24% d'approbation publique
Il a une grande communauté de fanatiques fidèles sur la Web et est également très actif. Mais de nombreux groupes de gauche se sont éloignés à cause de sa confrontation avec le monde de la santé pour les médicaments qu'il appliquerait dans la commune dont il est bourguemestre pour combattre la COVID.
Gabriel Boric (Front Ample); 15% d'approbation publique
Ses contenus ont rapidement réussi à imprégner les communautés d'autres secteurs. Il tente de maintenir l'image d'un «politicien dialoguant». Son irruption s'est accompagnée de la proposition de participation des travailleurs aux conseils d'administration. Cela lui a permis d'entamer une discussion autour de ses idées, générant un débat transversal sur le réseau, même avec des intellectuels conservateurs.
Pamela Jiles (Parti Humaniste); 54% d'approbation publique
Elle obtient des scores élevés sur les indicateurs d'impact et diversité d'interactions, révélant qu'elle s'adapte à plusieurs communautés grâce à des interactions de haute qualité. Sa stratégie comporte une attaque systématique à l'élite politique en général et contre des personnages spécifiques, tant de droite comme de gauche. Elle prétend prouver qu'elle n'a aucun intérêt partisan, en capitalisant une image personnelle plutôt qu'un ensemble d'idées. Elle profite aussi des événements politiques qu'elle parvient à s'approprier sans en être le promoteur originel, comme les retraits des fonds de pension. Avec cela, elle implique de grandes communautés transversales, leur faisant sentir qu'elles font partie d'une cause à laquelle elles contribuent. Et ces mêmes personnes commencent à considérer qu'il est utile pour leurs propres intérêts de la soutenir, une question absente dans le reste des candidatures. [De la pure démagogie, disent des analystes.]
Joaquin Lavín (UDI, de droite); 32% d'approbation publique
Est en 3e position en diversité, mais 6e en impact. Cela signifie qu'il n'a pas de communauté fidèle influente qui lui permette de générer des "trending topics", mais qu'il parvient à s'accorder avec différentes communautés numériques. Cela suggère qu'il n'a pas une grande capacité pour installer des thèmes.
Mario Desbordes (RN, de droite); 29% d'approbation publique
Ses indicateurs sont dans la moyenne, ce qui laisse à penser qu'il n'a pas de communauté très influente et que son contenu n'arrive pas toujours à se démarquer ou imprégner d'autres communautés, mais dans cette position il pourrait rapidement grimper dans des positions d'influence, selon les éventualités et comment elles seront gérées.
Sebastian Sichel (Evopoli, centre-droite libérale); 30% d'approbation publique
L'impact et la diversité de ses contenus sont systématiquement les plus faibles, ce qui montre que sa capacité à influencer l'opinion publique qui se manifeste dans les réseaux est égale à zéro. Il n'a aucune communauté influente qui le suit, et ses messages ne parviennent pas non plus à être entendus par les autres communautés. Ces dernières semaines, sa présence s'est accrue, mais sans obtenir de grands résultats.

** Avertissement des experts: Les médias sociaux, et spécialement Twitter, ne représentent pas la réalité mais tendent à renforcer les positions extrêmes (polarisation) alors que, dans la réalité, les modérés sont majoritaires. L'étude présentée ici pointe vers l'impact possible seulement sur les lecteurs de ces médias. Assez peu de personnes les suivent sans doute, mais les "tuits" (et les réponses) aident à définir l'agenda des médias traditionnels.
Les pourcentages d'approbation signalés sont de l'enquête du Centre d'Études Publiques et non de cette étude, et ne signifient pas nécessairement un appui politique.